Les Sexy Sushi vont certainement mettre le feu à l‘Antipode Mjc de Rennes le samedi 26 octobre 2013 pour conclure leur « Coucou toi tour » et le lancement de leur nouvel album Vous n’allez pas repartir les mains vides ? sorti en mai 2013. Ce duo perruqué et lunetté, Rebeka Warrior et Mitch Silver, a été révélé par leur participation, avec Le Sex appeal de la policière, à la bande-son d’un film de courts-métrages lesbiens en 2010, puis par une accumulation de scènes réussies et une excellente gestion de leur présence sur Youtube. Le grand public connait ces Bonnie and Clide de la scène undergroud française depuis environ un an. Et c’est tout à fait mérité. La puissance de Sexy Sushi, en sus de simples mais efficaces rythmes electroclash orientés dance-floor, c’est une puissance évocatrice. C’est toujours une réussite quand Rebeka Warrior se glisse dans la peau :
d’un macho décérébré qui frappe sa femme – Love les tartes ! Je t’obéis ! Pourquoi tu m’appelles ta pute ?
dans un tradi catho – qui aime ses enfants et son pays…
dans le bel âge adolescent de la découverte du corps et de l’amour – ou de ce qui est le besoin conditionné d’aimer l’idée d’être amoureux ; et alors ? Riquita, je t’aime un peu plus tous les jours…
dans une jeune fille mal dans sa peau à l’idée passionnante de boulotter et fouetter les parties intimes d’une pétasse enflammée – durant un ride terminal en Estafette…
dans les murs invisibles des cités amoureuses désertés par l’émotion – comment être un amant maîtresse dans un sexy ghetto ?
dans un body-builder suédois iconographique – il est costaud, c’est une distraction…
dans les rituels superstitieux archaïques – À genou le mystère des pommes d’Hinerbatus !
dans le bourbier médiatico-musical de majors en manque d’inspiration – à quand Sexy Sushi à l’Eurovision ? Rien à foutre : ils gagneront certainement avec Je t’encule putain de public, car je n’en veux qu’à ton fric !
dans tous les connards sympathiques ou antipathiques qui veulent aller radicalement au bout de leurs passions – quand bien même serait-elle des plus immatures, Princesse voiture et Rachida doivent arrêter de picoler et de se skipper le nez, etc.
Hyper-angoissé, tétra-corporalisé, homo-hétéro-homo, ultra-critique, incarné dans les angoisses contemporaines populaires et désincarné dans l’au-delà invisible d’un art impénitent, Sexy Sushi met en lumière et traite d’incarnations politico-socio-psychologiques sous un jour transgressif inédit. Et définitif. Si je te dis non, c’est définitif, à tort ou à raison, toujours excessif, je suis peut-être une enfoirée, c’est non-négociable.
Entre subversion des valeurs normatives, refus de l’action laborieuse au profit d’un art intégral, cyber-dance-punk, dadaïsme libertaire et actionnisme viennois, c’est la conscience hypersensible d’un monde qui s’effondre que Sexy Sushi s’emploie à exploser en direct live. Pour notre plus grand plaisir. Aucune raison d’en douter : tout le monde aime les enfants de sa meilleure amie et les gâteaux…
Toute cette haine qui s’incarne dans ces deux enfants de putain de salope ta mère, rituel dansant catastrophico-foutraque lancé à la face de l’hypermodernité, vous convie à un concert à ne pas manquer.
Quand à ceux qui souhaitent aller au-delà des apparences, n’hésitez pas à écouter tous les titres, y compris les moins écoutés, ils s’y logent des trésors. Toute la haine qui m’incarne (le véritable Retour de bâton), Cheval, Princesse voiture, Estafette, On devient fou ici, Marin, A genou, Oublie-moi, Amant Maîtresse, Calvaire (à la façon de Benjamin Biolay), la bombe (hommage à Boris Vian revisité par Stalone) et l’inattendu Stabat Mater dont l’interprétation hyperdoloriste semble se court-circuiter au profit d’un hymne d’amour. Elle jouit, aurait dit Jacques Lacan. Bref, Encore !
Nicolas Roberti