Georges Guitton a publié Rennes, de Chateaubriand au Père Ubu aux Presses Universitaires de Rennes, fin 2023. À travers une enquête historique et documentaire, l’ouvrage aborde la relation qu’ont entretenue de célèbres auteurs français du XIXe siècle avec la capitale bretonne, après un premier volet sur des écrivains du XXe. La rédaction a sélectionné quatre d’entre eux et vous propose aujourd’hui de déambuler le long des chemins empruntés par Chateaubriand dans la ville, entre sa scolarité et son engagement au moment de la Révolution.
La relation de l’auteur malouin – et de sa famille – à la capitale bretonne n’est pas toute rose. Son ancêtre direct y est décapité avec son frère en 1571, « aussi, quand au mois d’octobre 1781, à l’âge de 13 ans, François-René venu de sa campagne de Combourg débarque à Rennes pour entrer au collège, sent-il rôder dans les rues le fantôme de l’aïeul supplicié deux siècles plus tôt », raconte Georges Guitton. Certains de ses camarades trouveront également la mort lors de la Révolution et son frère sera décapité. Pour autant, ces aspects macabres ne sont que brièvement évoqués par l’auteur des Mémoires d’Outre-Tombe.
Les premières années à Rennes de François-René de Chateaubriand
Venu de Combourg dans une famille de la haute-noblesse bretonne, Chateaubriand intègre à 13 ans le collège de Rennes, situé rue Saint-Thomas, afin d’étudier les sciences et passer l’examen de garde-marine à Brest. S’il décrit Rennes comme une « Babylone bretonne », il décrit le collège comme « un monde » qui l’impressionne.
Dans l’établissement, l’auteur malouin et ses amis, entre deux farces, apprennent les mathématiques et la religion : l’éducation au collège visait à faire des élèves de bons chrétiens.
Les années de Chateaubriand à Rennes pendant la Révolution
Après ses années au collège, un passage dans l’armée et de diverses déambulations, il revient sur Rennes en mai-juin 1788. Il rejoint les revendications des nobles qui accusent Louis XVI « d’amoindrir voire de supprimer le pouvoir des parlements, cela au mépris des anciennes libertés bretonnes” telles que l’exemption des impôts pour les nobles. Ces derniers remportent cette bataille : « Le Premier ministre a démissionné. Les libertés bretonnes sont préservées ».
Au moment des États de Bretagne en 1789 qui se déroulent dans le réfectoire du Couvent des Cordeliers dans l’actuelle rue Victor Hugo (le bâtiment y fut cependant démoli), Chateaubriand – encore mineur – se prononce pour la défense des privilèges. « Sa vision de classe, fusse-t-elle une classe éclairée, libérale, parlementariste et anti-absolutiste, l’empêche de saisir les enjeux de la tourmente bretonne. » Dans son Essai sur les révolutions, il se définit comme « royaliste, par désespoir de ne pouvoir être républicain ».
Durant les actes révolutionnaires qui suivirent, le frère de Chateaubriand est décapité et ses sœurs, Julie et Lucile, et son épouse Célestine sont emprisonnées de décembre 1793 à novembre 1794 dans les « Cryptes révolutionnaires » à la prison pour femmes du Bon-Pasteur (prison de la Motte) située au 5 rue Martenot.
La postérité de Chateaubriand à Rennes
La municipalité de Rennes décide de rendre hommage à l’écrivain dès sa mort le 7 juillet 1848. Le Quai Saint-Georges, qui venait d’être construit, prend alors le nom de Quai Chateaubriand en hommage à la haute figure nationale des arts et des lettres qu’il était. Juste devant le nouveau Palais universitaire (aujourd’hui le Musée des Beaux-Arts sur lequel on distingue encore les lettres PALAIS en hauteur), « le quai Chateaubriand se trouve idéalement nommé pour symboliser la fierté d’une ville soucieuse d’afficher sa prééminence dans l’ordre de l’esprit ».
Georges Guitton, Rennes, De Chateaubriand au Père Ubu, préface de Pascal Ory, Octobre 2023. Achat disponible sur le site des Presses Universitaires de Rennes ou en librairie, 20€.
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