Il y a quelques années le cinéma nous invitait à découvrir un homme qui parlait à l’oreille des chevaux, nous, nous avons rencontré un homme qui laisse le bois s’exprimer. Il ne sera donc plus question de se demander si les objets inanimés ont une âme, avec Yves Brand’honneur c’est devenu une certitude. Loin du tapage des villes, c’est dans le calme village breton de Saint-Armel, au sein d’une ancienne ferme, que cet homme calme et réfléchi s’est un peu retiré du monde pour mener sa réflexion sur l’évolution du mobilier.
Il est né en juillet 58 au sein d’une famille d’artisans pour lesquels ce statut est ressenti comme une forme d’aristocratie professionnelle. Son cursus, classique, le conduit dans un établissement de Saint Grégoire, où lui sont enseignées toutes les bases de son métier. À 19 ans, il entame une carrière qui de petites structures en entreprises industrielles, lui donne une idée plus précise du futur qu’il souhaite bâtir. Le maître mot reste « indépendance ».
Malgré l’opportunité de reprendre l’entreprise de son patron désireux de bénéficier de sa retraite, il préfère créer sa propre structure et à 23 ans vole de ses propres ailes. L’époque n’est pas trop difficile pour celui qui n’a pas peur de retrousser ses manches et la fabrication de meubles de style, comme la restauration de meubles anciens, permet à un ébéniste compétent de vivre de son art sans beaucoup de soucis. Il fabrique également à l’époque des caisses destinées à recevoir des orgues électroniques, venus remplacer des harmoniums essoufflés et onéreux à réparer. En simultané, Yves Brand’honneur, soucieux de se perfectionner, s’inscrit dans une dynamique de formation qu’il qualifie lui-même « d’assidue et continue ». C’est donc sous la houlette de Yvon Palamour, maître ébéniste de renom et major de l’école Boulle, qu’il entame un difficile parcours vers son bâton de maréchal : le titre de « maître artisan ». Après de nombreux efforts et de fatigants cours du soir, il obtient le prestigieux diplôme en 91. Au cours de ces mêmes années, il constate la progressive désaffection du grand public pour les meubles traditionnels et cette tendance se ressent clairement dans le chiffre d’affaires. La nécessité de changer de cap s’impose comme une évidence.
Un événement auquel Yves Brand’honneur ne s’attendait pas va donner une nouvelle orientation à sa carrière. Son maître en ébénisterie lui demande de reprendre le flambeau de la formation au centre régional de promotion de l’ameublement à Vannes. Le point de passage obligé est l’acquisition du titre de meilleur ouvrier de France, et le challenge, en ébénisterie, n’est pas mince. En plus de l’activité professionnelle, le concurrent doit consacrer 1400 heures à l’élaboration d’une pièce de maîtrise qui sera examinée sous toutes les coutures par un jury de professionnels peu enclin à laisser passer la moindre erreur. Ils sont près de 100 à prétendre au titre suprême, mais peu à peu la liste se racornit, descend à 79, puis se réduit à 12 au moment de présenter les travaux. Yves Brand’honneur après avoir sacrifié au rite de la soutenance, rentre en attente du jugement qui lui parvient quelques jours plus tard, de la bouche d’un autre meilleur ouvrier de France, fort bien connu des Rennais, en la personne du charcutier-traiteur Monsieur Triand. C’est gagné !! Il entame donc sa carrière de formateur dont il reconnaît retirer une véritable progression personnelle. C’est le moment où l’articulation vers la production contemporaine se précise.
Afin de fédérer ce mouvement, il participe en 2004, à la création des « Ébénistes créateurs de Bretagne », nous en avions rencontré quelques-uns lors des journées Européennes des métiers d’art, dont le Rennais Thierry Laudren (voir notre article). Entre autres mandats auprès de la chambre des métiers, il est en charge, de 2010 à 2016 de l’ensemble des métiers d’art.
Chercheur infatigable, Yves Brand’honneur, à l’occasion de rencontres avec d’autres artistes, s’est lancé dans une activité nouvelle et complémentaire, celle de la construction de systèmes d’enceintes à pavillons, joignant une sonorité étonnante à une esthétique flatteuse. Il a pour cela travaillé avec Pierre Henry, sorte de professeur Nimbus de l’acoustique et grand connaisseur des micros « vintage » ainsi qu’avec le violoniste classique Hugues Borsarello, connu à Rennes pour avoir assuré quelques piges en tant que premier violon avec l’orchestre symphonique de Bretagne. Le résultat de ces réflexions communes est extrêmement positif, petit bémol, les niveaux de prix atteints limitent l’accession à ces systèmes à des professionnels ou à des clients aisés.
Voilà, vous savez presque tout sur Yves Brand’honneur, ébéniste, créateur et chercheur. Si cette nouvelle rencontre s’est avérée une fois de plus passionnante, ce qui ressort le plus, est cette volonté inébranlable d’être un véritable passeur et de communiquer à la nouvelle génération le geste et la connaissance, afin que ne se perdent pas les beaux savoir-faire de nos ancêtres. Pour autant pas question d’être ringard et l’œil reste inébranlablement tourné vers l’avenir. Un exemple à suivre !
Yves Brand’honneur, ébéniste créateur de mobilier contemporain
2 Allée de la Nouette 35230 SAINT ARMEL
Tél. : 33 (0)2 99 62 12 58
yves.brandhonneur[@]wanadoo.fr
Création, réalisation de pièces uniques estampillées, datées.
Fabrication de mobilier de série limitée, de un à huit exemplaires, estampillés,
numérotés.
Utilisation de bois régionaux identifiés.
Finition écologique, huile et cire.
Le mobilier de série limitée peut être personnalisé tant par ses dimensions que par le choix et la couleur d’autres bois.
Artisan créateur depuis 1984
Maître artisan ébéniste
Meilleur Ouvrier de France en 2000
Président de l’association professionnelle Ébénistes Créateurs de Bretagne
Adhérent aux Ateliers d’Art de France