Rennes. Jean-Baptiste Hanak expose Hexahèdre à la galerie Drama

jb hanak hexahedre

L’artiste plasticien Jean-Baptiste Hanak expose à la galerie Drama, 26 mail Louise Bourgeois, jusqu’au 18 mars 2024. Dans Hexahèdre, le public approche une œuvre plastique saturée et torturée, dont la sortie d’un double vinyle du même nom réalisée, avec le musicien Cyril Laurent, en est la pièce maîtresse. 

La galerie Drama est née de l’envie de créer une rencontre entre les arts-plastiques et d’autres pratiques. La nouvelle exposition répondant au titre d’Hexahèdre de Jean-Baptiste Hanak poursuit cette ligne artistique. « Son travail résonne avec la ligne de la galerie : le rapport à l’obsession, à l’ultra saturation, au temps qui se raconte et à comment on le construit », introduit Benjamin Massé, artiste et gérant de la galerie, à propos de Jean-Baptiste Hanak, aka JB Hanak, qu’il a rencontré il y a une vingtaine d’années  de la musique.

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Jean-Baptiste Hanak, galerie Drama, Rennes © Benoit Beauchaine

Car si Jean Baptiste Hanak dessine et peint depuis l’âge de 15 ans, après le visionnage d’un documentaire sur l’action painting – « je suis tombé amoureux de Robert Motherwell, Joan Mitchell et Jackson Pollock, le trio gagnant » -, l’artiste a priorisé DDamage, le groupe de musique électronique fondé avec son grand-frère Frédéric à la fin des années 90. Ce n’est qu’une fois le groupe bien installé sur la scène musicale que Jean-Baptiste à l’occasion de ressortir cette corde à son arc que personne ne connaissait. En 2014, il crée son album solo, Hyperaktive Jerk, et se charge de l’artwork. A sa sortie, son CD se retrouve sur le bureau de Agnès Troublé, fondatrice de la marque de vêtement Agnès B et la magie opère : « Elle n’était pas intéressée par la musique, mais a voulu être mise en contact avec l’artiste qui avait travaillé sur l’artwork. », raconte l’artiste. Du jour au lendemain, il se retrouve à faire des vêtements, à aller à Tokyo, etc.

Son style a certes évolué depuis son adolescence, mais restent toujours présents le fourmillement, le détail et le remplissage. Peut-être la peur du vide ? En tout cas, « l’obsession d’en foutre un max, de saturer l’espace, avec l’envie de faire saturer la rétine », comme il le souligne. Face à cette œuvre personnelle, le public est projeté dans un paysage mental habité de figures qui évoluent vers une abstraction totale. Autant musicalement que plastiquement, sans créer un lien entre les deux, le travail de JB Hanak traduit un mode opératoire et une démarche artistique, celui de l’obsession. L’obsession de la cartographie qu’il a depuis toujours, nous raconte-il. Jean-Baptiste la travaille, voire la retravaille depuis qu’il a tronqué les multiples pour des œuvres originales. « On est au-delà de l’obsession. On est dans l’obsession de l’obsession, il arrive que je laisse reposer un brouillon six mois pour y revenir après. Ce sont des petits trésors cachés que je me permets d’oublier et que je redécouvre. »

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Hexahedre de Jean-Baptiste Hanak, galerie Drama, Rennes © Benoit Beauchaine

Si on retrouve des airs de Keith Haring dans la toile, une des plus anciennes, qui ouvre l’exposition, Jean-Baptiste ne se reconnaît dans le street art. L’artiste américain peut se révéler une inspiration comme une autre, mais éphémère. « C’est peut-être aussi un rapport de dualité que j’avais avec mon grand-frère qui, lui, venait du street art. Mes parents allaient souvent le chercher au commissariat », confie-t-il. « Me revendiquer du street-art serait opportuniste envers les vrais street-artistes et je veux garder le souvenir de mon frère intact, sans l’aspirer. J’étais l’élève silencieux au fond de la classe qui dessinait dans son carnet et pas le mec héroïque qui allait faire des fresques et défonçait tout », déclare-t-il en racontant ses histoires de famille pour une raison : « Sans être des traumatismes, ce sont des mauvais souvenirs qui s’enchaînent et qui construisent ta personnalité. » Benjamin Massé ajoute : « Les petites figures qui se cachent, c’est un peu J. B. et les histoires. C’est quelqu’un qui raconte les choses, son travail littéraire est aussi lié à ça. C’est sa manière de s’exprimer, de raconter son monde. »

Cette première impression s’efface cependant rapidement au profit de l’Art Brut dont l’influence était au départ inconsciente. Il découvre ce mouvement foisonnant sur le tard avec le magazine Hey !, les expositions à la Halle Saint-Pierre et la galerie Christian Berst à Paris. « Je me sentais comme à la maison », se rappelle-t-il.  

Les anciennes œuvres laissent ensuite place à sa dernière série qui porte le nom de l’exposition : Hexahèdre, titre de l’album concept réalisé avec le musicien Cyril Laurent et sorti en double vinyle chez Parigo Music et Arbouse Recordings. L’album est composé de huit morceaux possède autant de tableaux qui sont accrochés dans la deuxième partie de l’exposition. Plus qu’une série, Jean-Baptiste Hanak entre dans un nouveau pan de sa création qui puise son énergie dans la spiritualité et le mysticisme, voire l’ésotérisme. “Cyril Laurent a été la première personne avec laquelle je me suis remis à travailler depuis le décès de son frère [en 2018]”, confie J.B. Hanak. Le projet est devenu un album conceptuel dont les morceaux avait comme thématique les expériences extra-corporelles : spirituelles, l’ingestion de produits psychotropes (DMT, champignons hallucinogènes, ayahuasca) et médicales.

Les créations à dominante verticale envahissent toute une longueur de mur tels des totems picturaux, la communion de l’histoire de l’art, des civilisations anciennes et des obsessions de l’artiste. Dans un rapport à la symbolique fort, les références intellectuelles importent peu dans les images sélectionnées, ce sont les dessins en eux-mêmes qui attrapent le regard de l’artiste : le fragment d’un tableau, la forme d’un logo, etc. qu’il s’approprie et détourne. « On peut y voir autant de l’art textile africain, un circuit électronique, une carte géographique avec une vision du monde simplifiée, un peu de gothique aussi », trouve Benjamin Massé. La descente du ciel de Jésus Christ avec Adam et Eve qui l’attendent, gravure de Bruegel, devient la descente d’un personnage mi-homme-animal et un Adam qui possède une poitrine. Du fait des ses inspirations multiples, l’empreinte plastique de JB Hanak ne peut être que forte, contrebalancée par des couleurs pop. 

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« Réussir à apporter une scénographie zen avec mes œuvres qui sont torturées et saturées, est un paradoxe délicieux » 

Au-delà de la musique et des arts-plastiques, le projet Hexaèdre se prolonge dans une expérience de réalité virtuelle en cours de création, avec le studio Unicorn 3D Paris. A l’état de prototype, le projet a été pensé comme un jeu vidéo et pour être projeté dans de grandes galeries. Chaque morceau serait un niveau, il y en aurait pas huit. Deux existent pour le moment. L’utilisateur était invité dans une expérience mystique de dédoublement corporel, inspirée par les témoignages lus. « Tu es plongé dans les visuels des tableaux qui se déforment quand tu les touches. La musique est reliée à des plugins paramétrés afin d’être modulée en fonction du toucher », une modulation sonore en fonction de la modulation visuelle en somme. « Le principe d’expérience de réalité virtuelle était très personnel et on souhaiterait faire sortir l’utilisateur de cet enfermement. » L’utilisateur serait placé au milieu d’une pièce avec une projection subjective de son expérience sur les murs pour que les autres personnes autour puissent la voir et la partager avec lui, et également l’entendre. Ce projet de longue haleine n’en est qu’à ses prémices, la conception demandera de deux à quatre ans. « Le principe est de réussir à traverser le tableau pour aller au-delà, passer dans un champ de lumière qui permet de changer de niveau. » Avant de travers le miroir de la réalité, le public est d’abord invité à contemplant l’œuvre de Jean-Baptiste Hanak afin de tenter de voir ce qu’il s’y cache.

Du 22 février au 18 mars 2024, Hexahèdre de JB Hanak
Galerie Drama
26 mail Louise Bourgeoise
35 000 Rennes

Ouvert tous les jeudis et vendredis soirs

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