Rennes 2. Première répétition au Tambour pour la Compagnie de l’Onde

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Première répétition (c) Béatrice Brun

Connaissez-vous le groupe de punk féministe Première Répétition ? Si ce n’est pas le cas, réjouissez-vous : la compagnie de l’Onde a décidé de redonner vie à son histoire dans une performance à la croisée des genres qui porte son nom. A découvrir au Tambour de l’Université Rennes 2 mardi 30 septembre 2025.

Si le point de départ a été donné par Manon Ayçoberry et Zoé Labasse, Camille Falbriard et Siloë Saint-Pierre ont vite rejoint le projet pour une écriture collective. L’envie était, à l’origine, de travailler sur les figures de guerrières, mais c’est au final la découverte des Riot Grrrr ou Riot Girls- mouvement musical féministe punk né aux Etats-Unis dans les années 90 – qui a guidé la création. Au cours de leurs recherches, elles prennent connaissance de Première Répétition, un groupe de quatre musiciennes qui ne savaient pas jouer d’instruments, mais qui ont connu le succès justement pour cette raison. « Elles ont fait de la tentative et de l’espoir de la musique une réalité », introduit Manon Ayçoberry, directrice artistique de la compagnie et comédienne. Boostée par l’énergie de cette scène musicale alternative, le quatuor décide de remettre l’histoire de ce groupe sous le feu des projecteurs.

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Première répétition (c) Mona Clavel

A la croisée des genres, Première Répétition mélange documentaire, musique et théâtre, tout autant que réalité et fiction. La compagnie reprend les codes du documentaire musical dans une alternance de séquences d’interviews, d’archives et de reprise de concerts. Elle a créé une constellation de personnages qui a participé à la vie de ce groupe dont le succès a été aussi fulgurant que fugace. « Les filles de Première Répétition ont dit qu’elles avaient un groupe et sont allées au bout de la démarche », poursuit Manon. Camille Falbriard enrichit : « Ce qui était au départ un mensonge est devenu une réalité parce qu’elles n’ont pas eu d’autres choix. » Les quatre comédiennes se sont alors inscrites dans la même démarche que le groupe de musique. « Elles ont pu émanciper tout un public de la nécessité de bien faire les choses. »

Et c’est ce dont il est justement question dans cette création, d’émancipation. D’abord, par l’improvisation : « Ne pas savoir jouer d’un instrument, mais le pratiquer et utiliser la potentialité de l’échec comme une force crée une forme de complicité avec le public », analyse Camille.

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Manon Ayçoberry dans Première répétition (c) Mona Clavel

Si une trame narrative a été construite, chacune possède une liberté individuelle concernant son personnage afin de réinventer la manière dont est racontée l’histoire. « On s’est emparé de cette légende dans sa globalité, mais on en dit ce qu’on veut », précise Manon. « Pour la musique, l’idée est que la représentation ne soit jamais la même. » Ainsi, il est courant que les paroles des morceaux varient et changent de sujet. Elles inventent, improvisent et risquent l’échec. « L’improvisation offre une part de risque qui est pour nous très agréable, auquel on a peu l’occasion de se confronter en tant que comédienne. » Camille rajoute : « Pouvoir rater fait partie de la démarche. Si on ne se mettait pas dans cet état, on manquait un élément important de ce dont on parle. C’est le sujet de la création donc le public est complice et à l’affut de ce qui émerge et se crée. »

A l’image de la compagnie de l’Onde au cours de la création, le public devient enquête : qu’est-ce qui est réel et qu’est-ce qui ne l’est pas ? Avoir la liberté de porter, à chaque fois, le spectacle ailleurs et le faire résonner avec le public face à elle donne une authenticité au jeu qui sort la création de toute temporalité. « L’histoire passée se déroule au final en même temps, parce que nos archives, c’étaient des moments de pur présent. »

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Première répétition (c) Mona Clavel

Il est aussi question d’émancipation en tant que femme. « Il est question d’oser, en tant que femme, prendre cette place quitte à rater. » La compagnie revendique cette prise de parole et cet espace de création dont beaucoup de femmes n’osent pas s’emparer. « J’ai fait huit ans de conservatoire de musique, mais je n’ai pour autant jamais osé prendre la scène comme je le fais avec ce spectacle », confie Manon. « Ce qui est commun dans la socialisation d’une femme est ce regard sur soi permanent à cause duquel on essaie de rentrer dans un cadre. Ici, on a cassé le cadre. » Notre expérience de jeunesse nous le prouve : il est en commun qu’un groupe de filles se réunissent pour faire de la musique. « C’est un peu cliché, mais c’est un peu la base de la sociabilisation chez les mecs au collège ou lycée », soutient Camille. « Si on le fait, on a l’impression qu’on doit être plus pertinente, inventive et juste, mais ce qu’on veut revendiquer, c’est qu’on a le droit de ne pas être des personnes cool. »

« Ce spectacle m’a beaucoup émancipé et m’a permis d’oser de faire des choses dans mon quotidien », Manon

Première Répétition s’inscrit dans le prolongement de la direction artistique de la compagnie de l’Onde : qu’il s’agisse de partir en manif avec Entre nous, il y a Gênes ou de prendre la parole et la place avec cette nouvelle création, chaque projet participe à l’émancipation et la politisation de la compagnie. « J’essaie de proposer un théâtre qui essaie de se positionner et de rassembler dans ce positionnementIl ne s’agit pas de se placer en opposition, mais plutôt se retrouver ensemble face des sujets politiques, sociétaux et sociaux », conclut Manon.

Infos pratiques :

Campus de Villejean (Rennes), Le Tambour (bât. O), mardi 30 septembre 2025, à 20h (1h)

Tarifs : 12€ / 5€ / 3€ / Gratuit pour les étudiantes et étudiants des universités de Rennes. Réserver sa place