Whisky breton, précisions et démentis autour d’une IGP alambiquée

Dans un récent article, nous revenions sur les raisons qui avaient poussé la distillerie Glann Ar Mor à annoncer, puis à revenir, sur sa fermeture. En cause, le projet d’IGP « Whisky Breton » et son cahier des charges médiatiquement disputé. Il s’est pourtant avéré, à la suite d’un contact avec M. Roussier, directeur de Warenghem, que de fausses affirmations l’aient jalonné ; des erreurs qui soulèvent néanmoins de nouvelles questions quant à la conception de ladite IGP.

 

Une IGP aux coulisses alambiqués

distillerie warenghemParmi les différentes publications qui ont accompagné la fermeture de la distillerie Glann Ar Mor, nombreuses et variées étaient les explications données et il était devenu bien difficile de comprendre l’ensemble des arguments avancés par chacun. Un article récapitulatif étant le bienvenu, nous nous y sommes donc essayés. Bien mal nous en a pris quand il s’est avéré à la suite d’une communication avec M. Roussier de la distillerie Warenghem,  que nombre d’informations que nous publiions étaient finalement fausses, preuves à l’appui. Si des excuses sont bien évidemment de mise, ils nous incombent aussi de réparer et de revenir sur ces contre-vérités, des affirmations qui laissent néanmoins perplexe quant à ce projet d’IGP « Whisky Breton ».

Nous avions tout d’abord compris et affirmions que l’absence d’une IGP « Whisky Breton » ou « Whisky de Bretagne » aurait contraint la distillerie Warenghem à renommer quelques-uns de ses produits, les blends WB et Breizh Whisky. Il n’en est rien. Il s’avère en revanche que sans ladite appellation, ces mêmes produits n’auraient plus été en mesure de porter la dénomination Whisky Breton, comme aucun autre whisky produit en Bretagne si le projet d’IGP n’avait pas été porté jusqu’au bout. Dans les cas inverse tout évocation de la Bretagne sur les bouteilles auraient été prohibée.

breizh whiskyQuant à la conception du cahier des charges de l’IGP, il nous faut revenir sur quelques points. Nous écrivions que M. Roussier avait engagé une nouvelle démarche auprès de l’INAO en faveur d’un nouveau cahier des charges. Il s’avère en réalité qu’alors que les trois distilleries Glann Ar Mor, Distillerie des Menhirs et Kaerilis avait signifié à l’INAO en 2012 renoncer à la démarche d’IGP – des lettres restées mortes, selon Jean Donnay – la distillerie Warenghem l’a tout de même poursuivie. Recontactées par la suite début 2014 par l’INAO, les quatre distilleries se sont de nouveau réunies le 19 mars 2015 afin d’établir un nouveau cahier des charges qui ne pénalise aucun des producteurs. Démarche réussie selon M. Roussier puisque à la suite de cette réunion, Jean Donnay – de la distillerie Glann Ar Mor –s’est déclaré favorable au nouveau cahier des charges et M. Mueller de la distillerie Kaerilis réintégrait le lendemain même le projet d’IGP.

Quant à une éventuelle inclusion tardive du blé noir dans le cahier des charges de l’IGP, afin d’en permettre l’adhésion à la distillerie des Menhirs – dont les whiskies sont produits à partir de blé noir – faute est de constater que celui-ci était déjà présent dans ce même cahier des charges depuis le début, soit depuis 2009.
Seulement, si on ne peut contester à M. Donnay le manque d’ambition du cahier des charges quant à la production du single malt – l’absence d’interdiction d’ajout de colorant E150a comme pour le Whisky Alsacien ou l’absence d’embouteillage en Bretagne – faute est de constater que, contrairement à ce que nous avancions et à ce qui a pu être avancé par d’autres publications, les alambics utilisés et conçus par lui ne sont aucunement exclus de l’IGP.distillerie des menhirs S’agit-il d’une incompréhension entre les diverses parties de l’affaire ? Ce ne serait pas la seule.

Toujours est-il que contrairement à ce que nous affirmions, seul l’Only Rye, single malt produit à partir de seigle et non d’orge, ne pourrait porter l’appellation Single Malt. Le reste de la production de la distillerie, dont les reconnus Glann Ar Mor et Kornog, ne souffrirait en aucun cas de la perte des appellations Single Malt ou Whisky Breton, comme nous avions pu le laisser penser. Quant à savoir si l’Only Rye ne pourrait porter l’appellation Whisky Breton ? Le seigle fait pourtant bien parti des céréales prises en compte par le cahier des charges de l’IGP…

On ne pourra que se réjouir du maintien de la distillerie Glann Ar Mor et de son retour au sein de l’IGP Whisky Breton, qui garantit à tous un Whisky Produet e Breizh (produit en Bretagne) et prévient les distilleries bretonnes d’une concurrence internationale déloyale. Toutefois, le débat public souhaité par M. Donnay avec l’INAO et les autres distilleries bretonnes ne saurait être que bénéfique, presque nécessaire, pour enfin faire la lumière sur cette IGP, dont les implications concrètes pour les producteurs comme les conditions d’adoption mériteraient encore quelques clarifications.

Crédit photo : Kaerilis, Warenghem, distillerie des Menhirs

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Thomas Moysan
Thomas Moysan est rédacteur en chef des Décloitrés, revue biannuelle de Sciences Po.

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