Hospice Odyssey sera diffusée pour la première fois sur grand écran samedi 2 octobre au cinéma Arvor de Rennes, dans le cadre du festival Court-Métrange. La web-série d’animation réalisée par Grégoire Lemoine et produite par Vivement Lundi ! et Girelle Production relate l’aventure futuriste d’une bande de millenials devenus retraités, propulsés dans l’espace sous prétexte d’un plan canicule… Visionnaire.
La web-série d’animation Hospice Odyssey atterrira au cinéma l’Arvor, sans turbulences pour une première diffusion sur grand écran samedi 2 octobre, à 16 h. Unidivers a rencontré son réalisateur Grégoire Lemoine et Jean-François Le Corre, fondateur de la société de production Vivement Lundi !, pour décrypter le plan de vol de cet OVNI.
Dix ans se sont écoulés entre le court métrage Janine, film de fin d’études de Grégoire Lemoine, diplômé de L’École La Poudrière, et le début de la production de la série Hospice Odyssey. Durant cette décennie, les événements climatiques extrêmes se sont multipliés aux quatre coins du monde, le tourisme spatial s’est développé sous la houlette du fondateur d’Amazon Jeff Bezos et de l’ingénieur milliardaire Elon Musk, enfin, la propagation du Covid a banalisé le principe de confinement…
Ce sont autant de phénomènes actuels qu’on retrouve en creux dans la nouvelle réalisation visionnaire de Grégoire Lemoine. « Parler d’un sujet d’actualité n’était pas l’objectif principal, tout est parti d’un collage. Je me suis amusé à mettre un château dans l’espace, un coup de ciseaux dans l’image d’une Terre, et la suite est venue naturellement. Le sujet du dérèglement climatique est venu se greffer au projet et a donné un prétexte à ce départ de vieux dans l’espace », se rappelle-t-il.
D’autres sujets, tel le tourisme spatial et le confinement, se sont par la suite ajoutés pendant la fabrication. « On n’imaginait pas que Jeff Bezos et Elon Musk allaient envoyer des fusées dans l’espace tous les trois mois », rajoute Jean-François Le Corre, coproducteur et fondateur de Vivement Lundi !. Une heureuse coïncidence soit, ou un signe de plus que réalité et (science-)fiction sont de moins en moins aisées à discerner.
Composée actuellement de 15 épisodes, donc certains sont déjà visible en exclusivité sur le site Internet de Court-Métrange, Hospice Odyssey embarque le spectateur, de 10 à 97 ans, dans un univers complètement loufoque, où l’absurde rencontre les problèmes quotidiens d’une bande de retraités, millenials devenus grabataires, propulsés dans l’espace, sous prétexte d’un réchauffement climatique sans précédent. Coincés à bord du Verveine, vaisseau-résidence trois étoiles, les personnages sont livrés à eux-mêmes, sans personnel soignant, de cuisine ni d’entretien. Leur seul lot de consolation ? Un adolescent clandestin, parfait souffre-douleur à leur service.
Et qu’on se le dise tout de suite, pas de petits hommes verts (ou gris) au menu, pour la simple et bonne raison que, pour une fois, ce sont les humains qui sont extraterrestres ! Des seniors en proie à leurs soucis de santé et leurs problèmes de personnes âgées…
Portrait d’une génération…
La grande particularité de la série, peut-être même sa force, est qu’Hospice Odyssey dresse le portrait d’une partie de la société souvent exclue, mise à la marge, comme si « elles avaient fait leur temps », en reprenant l’expression. Alors pourquoi ne pas les envoyer dans l’espace après tout ?
À l’instar des personnes âgées que l’on côtoie, les personnages de Grégoire Lemoine se révèlent attachants et surtout hilarants. Malgré leur méchanceté et leur cruauté, propres à tout être humain, avouons qu’on les aime nos vieux qui s’amusent parfois avec leur dentier, se servent de leur canne comme extension de leur bras pour frapper un jeune avorton ou se permettent de donner des leçons de morale alors qu’ils sont nés au siècle dernier… « Quand on arrive à un certain âge, la patience a ses limites. On devient impulsif et hyper-réactif, le contraire de ce qui est demandé dans l’espace. La série montrent aussi que les personnages ont beau être abandonnés, ils arrivent toujours à s’en sortir », souligne Grégoire.
Au milieu de ce groupe où la moyenne d’âge frôle les 90 printemps, un adolescent clandestin, baptisé Grégoire, venu rendre visite à sa grand-mère Brigitte, se retrouve par inadvertance doublement confiné – dans l’espace et avec une génération (très) loin d’être la sienne. Personnage absent aux prémices de la série, la complexité de la production d’animation pour adulte en Europe a en effet contraint l’équipe à remanier légèrement le casting. « Les potentiels financeurs reconnaissaient le charisme de chaque personnage et le potentiel comique de la série, mais les réseaux sociaux, le web et l’animation pour adulte sont majoritairement consommés par des adolescents », énonce Jean-François. « On a finalement décidé d’intégrer ce personnage jeune pour créer un choc de génération », précise le réalisateur.
Baisser l’âge des grands-parents et envoyer des ados dans l’espace n’avait aucun intérêt selon l’équipe de Hospice Odyssey. La série Lost in Space envoie déjà une famille dans l’espace et pour les cosmonautes perdus, il existe la série Cosmos 1999. En revanche, une bande de vieux dans une maison de retraite spatiale et un adolescent arrivé de nulle part… « Dans la comédie, il faut des personnages un peu paroxystiques pour que ça fonctionne. L’ado a les travers et les qualités d’un adolescent venu d’un futur lointain et il est confronté à ces seniors, qui eux n’ont plus rien. Il va assumer toutes les tâches alors que les autres vont lui en faire baver des ronds de chapeaux », explique Jean-François Le Corre.
À la puissance des caractères savamment écrits s’ajoute la crédibilité dans le jeu d’acteur, certainement dû au casting, exclusivement composé d’amateurs.rices, qui confère une réelle authenticité à la série. En charge du recrutement, Girelle Production a été « chassé du vieux », un choix sur lequel Grégoire n’aurait pas transigé : « Je voulais de la fraîcheur et de la spontanéité, qu’ils n’aient pas de tics de comédiens. Cette envie et cette énergie aussi. C’était une super expérience pour eux et je voulais partager quelque chose avec les comédiens qui ont donné leur visage et leur voix à la série. »
… propulsée dans l’espace.
Très peu de comédies de science-fiction sont actuellement produites en France, mais avec des références comme Objectif nul du vénéré Alain Chabat et des films préférés comme Alien et Blade Runner, il semble évident que Grégoire Lemoine n’aurait pu installer son histoire dans un autre univers. « Je voulais vraiment faire un film de science-fiction pour mon court-métrage de fin d‘études. C’est un genre beaucoup trop sous-représenté en France, c’était l’occasion de se lancer dans cette aventure ».
Amusé par son humour de vieux et le côté vieillot de sa science-fiction, Jean-François est persuadé, la rédaction d’Unidivers également, que cet assemblage absurde fera sa réussite. « C’est casse-gueule d’imaginer l’avenir et de créer un univers complet qui vieillit bien. Si vous prenez la science-fiction des années 50-60 – à part 2001, l’odyssée de l’espace, la plupart des productions sont désuètes aujourd’hui. Ils n’ont jamais été capable d’anticiper à quoi ressemblerait l’avenir… Je ne parle pas des films des années 80, notamment Blade Runner dont la proposition visuelle reste intéressante », argumente le coproducteur. « Le truc génial c’est que Grégoire fait déjà de la science-fiction de vieux, ça ne peut que bien vieillir ! »
À l’instar de Janine, l’univers s’est créé à partir d’images de papier, découpées notamment dans les pages du catalogue Manufrance, une mine d’or pour le réalisateur qui pratique le collage à titre personnel. « C’est une technique que je connais et maîtrise. Pour le visuel d’Hospice Odyssey, le visuel de Janine a été affiné autant au niveau des contrastes que des décors pour créer un univers bricolé, un peu cyber punk. »
Que dire, si ce n’est que le résultat est bluffant, délicieux même. Les personnages, vieux rétro futuristes sortis du 20e siècle, enchaînent les punch lines pour une série WTF qui nous ressemble : le contrôle fiscal, mamie sur Meetic du futur, les médecins ayant recours à la cybernétique pour soigner le mal de dos, etc. L’équipe du scénario a pris les problèmes des seniors et les a transposés dans un futur plus ou moins proche. Les vieux parlent toujours de la météo ? Grand bien leur fasse, ils parleront alors d’une pluie de météorites ! « On s’est parfois inspirés de films alambiqués, comme Universal Soldier avec Jean-Claude Van Damme et Dolph Lundgren », confesse Jean-François. « Mais l’homme augmenté est une réalité. La série se situe dans une culture qui ressemble beaucoup à ce que l’on vit aujourd’hui. Nos vieux ont vécu avec ces thèmes et quand ils sont dans l’espace, ils bricolent avec. » Chaque épisode est un condensé de gags, trois minutes bourrées à bloc, mais dont chaque intervention sert à l’histoire. « Cette exubérance au niveau du scénario est venue naturellement et ce dynamisme vient contrebalancer le côté pantouflard », déclare Grégoire. « On tourne toujours autour de cette notion de collages, autant visuels que dans les traits de caractère des personnages. C’est de l’assemblage de morceaux – du vieux et du récent – qui ne semblent pas compatibles, mais qui pourtant créent quelque chose de cohérent », conclut Grégoire.
On souhaite donc à Hospice Odyssey de trouver son public pour réaliser une nouvelle saison.
Hospice Odyssey, dans le cadre du festival Court Métrange, samedi 2 octobre à 16h, Arvor Cinéma.
Entrée libre dans la limite des places disponibles.
Le réalisateur Grégoire Lemoine et une partie de son équipe partageront leurs secrets de fabrication avec le public. Une avant-première organisée en partenariat avec l’Association Française de Cinéma d’Animation, France 3 Bretagne, TVR, Tébéo et Tébésud.
Épisodes en ligne sur la plateforme Spamflix et sur le site de Court Métrange.
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Une série créée et réalisée par Grégoire Lemoine
Ecrite par Sidonie Traverse, Céline Dréan, Mathieu Courtois, Jean-François Le Corre et Grégoire Lemoine
Musique originale composée par Alexis Pécharman
Produite par Jean-François Le Corre, Mathieu Courtois et Christophe Camoirano