Le festival Court Métrange a commencé à essaimer ses propositions galactiques depuis mardi 21 septembre 2022. Le compte à rebours s’est enclenché avant le lancement de la compétition internationale, début des métrangités au cinéma Gaumont, mardi 27 septembre 2022. Une nouvelle fois au programme, des séances uniques en leur genre. Et si cette année l’équipe la plus étrange de Rennes vous parlait de ses coups de cœur ? Installez-vous dans votre canapé, prenez des pop-corn et savourez cet amuse-bouche servi par Court Métrange.
Chaque année à cette période, la population rennaise est en ébullition. La rentrée ? Non, elle trépigne seulement à l’idée d’envahir les salles obscures du cinéma Gaumont pour une semaine (ou presque) de visionnages intensifs autour de l’étrange et de l’insolite, parfois du trash… En cette 18e édition, à quelle sauce allons-nous être mangés ? Pour la première fois, le festival Court Métrange remet le Graal à la rédaction Unidivers. Une idée ? Des coups de cœur de la compétition internationale bien évidemment ! Le choix a été sans nul doute difficile, tous les films étant susceptibles de remporter un prix. Suivons les guides dans les méandres des séances métranges. Quels univers ont fait chavirer le cœur de l’équipe ?
Séance inaugurale, « Star Maniac » donnera le top de départ d’une semaine riche en univers cinématographiques d’une beauté, parfois terreur, saisissante. Elle sera la seule à revêtir l’uniforme de la thématique annuelle et a nous propulser dans des mondes alternatifs et des multivers en quête d’une vie encore inconnue des Terriens.
Parmi les films qui gravitent autour des étoiles et autres astres, une mention spéciale est attribuée au court métrage américain Jettison de JJ Pollack, une « très jolie SF qui interroge nos désirs de vie et notre rapport au temps ». Une jeune femme s’embarque pour combattre dans une guerre interstellaire, mais elle va devoir lutter contre les effets d’être séparée de sa maison par le temps et l’espace.
Le cœur de l’équipe s’est également liquéfié (de tendresse) pour Slow Light des Polonaises Katarzyna Kijek et Przemyslaw Adamski. « Un magnifique film d’animation extrêmement émouvant et futé » dans lequel un petit garçon de sept ans, aveugle de naissance, aperçoit pour la première fois la lumière. Il apprend que ses yeux ont besoin de sept ans pour que la lumière atteigne sa rétine… Incapable de déchiffrer son présent, l’enfant n’arrive qu’à élucider des faits déjà résolus depuis des années.
« Étranges desseins », la fameuse projection consacrée à l’animation, réserve une nouvelle fois des splendeurs graphiques. Cette séance est de celle qui a le plus de succès. Elle demande de l’anticipation de la part des festivaliers tellement les places sont prisées, et pour cause, chaque année est proposé un panel d’univers éclectiques et de personnages loufoques qui raviraient n’importe quel amateur et amatrice.
Parmi la sélection, le Chilien Hugo Covarrubias a su saisir le cœur (à point) de l’équipe avec Bestia, un film percutant sur le régime de Pinochet et particulièrement tordu, inspiré de faits réels… L’étrangeté et la poésie d’Écorchée du Français Joachim Hérissé n’a pas laissé indifférent non plus. Ou peut-être est-ce la dose de glauque qu’a infusé le réalisateur dans son histoire de sœurs siamoises aux cauchemars perturbants et terrifiants ?
Que serait le festival Court Métrange sans la visite de la Grande Faucheuse à l’écran ? Elle sera l’invitée principale de la séance « Les aventures de l’âme invisible ».
L’équipe métrange a, nous le savons, beaucoup d’humour. Peut-être est-ce pour cela qu’ont conquis On your behalf de l’Anglais Theo W. Scott et The Rock of Ages d’Eron Garcia Rico. Le premier, « une bouffée d’air amèrement drôle » suit Ava, jeune femme qui passe à l’action et réalise ses fantasmes les plus mortels. Dans le second, un soldat trébuche dans un paysage vaste et désolé, tentant d’échapper au mal qu’il a fait, « un univers en décalage pour une farce très habilement menée ».
Un dernier coup de cœur pour la route ne fait jamais de mal. Connu pour ses rôles dans la série Heroes, dans la récente saga de Star Trek et dans la saison 2 de la série d’anthologie American Horror Story, l’acteur Zachary Quinto est à l’affiche de Chaperone de l’Américain Sam Max, un court-métrage « dur, mais très beau et étonnant dans son traitement » pour reprendre les mots de l’équipe.
La séance « Régions intimes », attention aucun caractère équivoque ou prétention pédagogique dans le contenu, plonge dans des vicissitudes bassement humaines. La beauté de deux courts métrages français a particulièrement attiré l’attention de l’équipe : Lucienne dans un monde sans solitude de Geordy Couturiau et Le Censeur des rêves de Léo Berne et Raphaël Rodriguez. Peut-être est-ce pour leur ancrage dans l’ordinaire de la vie, dans les profondeurs de l’âme humaine et ses craintes ?
Dans le premier, les personnages vivent dans un monde où chacun partage sa vie avec son double. Les relations exclusives et l’individualisme ne sont pas tolérés dans ce moment. Dans le second, les rêves sont modérés pour annihiler toutes pensées douloureuses…
Une plongée dans le psychisme de protagonistes tourmentés pour croiser des pathologies de l’âme attendent les spectateurs de la séance « Affections durables (et autre maux croisés) », première projection du jeudi 29 septembre. L’équipe de Court Métrange se lèche les babines (avec classe toujours) à la pensée de ces récits bizarres qui satisferont le (malin) plaisir de ceux et celles qui s’aventureront dans la salle de cinéma pour la dernière séance du jour.
Sur le podium de cette projection : Chimera de Dayan D. Oualid. Le réalisateur français avait déjà livré un très beau film Dibbuk et revient avec une expérience sensorielle très intéressante : Michael vit avec son chien et est frappé par une surdité brusque… ce traumatisme le replongera dans des expérimentations passées jusque dans ses retranchements les plus sombres. Suivra The Vandal, réalisé par Eddie Alcazar et produit par le réalisateur Darren Aronofsky (Black Swan), une petite beauté qui vient des USA. Après avoir subi une lobotomie, le grand amour de Harold disparaît soudainement. Quant à Lily’s Mirror d’Adam Pinney, c’est un véritable « petit coup de cœur pour un univers audacieux porté par une forme de féminisme en décalage ».
Les enfants hanteront la séance « Les 401 coups ». Deux coups de cœur : Donkester du Belge Frank Van Den Bigaart « pour sa poésie et l’interprétation de la jeune fille » et Amissa Anima de l’Australienne Tatiana Doroshenko « pour le magnifique traitement de cette terrible histoire ». Basé sur des faits réels, le film suit quatre garçons dans les rues sordides du quartier de St Kilda dans l’Australie des années 80.
Passons à la séance « Tripes-ing »… Nul besoin d’explication à cet intitulé qui promet une plongée organique dans le corps humain. Parmi les six courts métrages projetés, retenez Growing de la Française Agata Wieczorek, « un choc pour cette bombe de malaise qui parle du droit à l’avortement » et Guts de l’Américain Chris Mclnroy, « petit coup de coeur pour ce gore rigolo d’un réal qu’on aime bien et qu’on a déjà reçu chez nous ».
« À âmes inégales » sonne le dernier soir des projections de la compétition internationale. En ouverture de cette soirée, Court Métrange offre « une promenade trompeuse vers des intrigues à la croisée du vaudou et de l’envoûtement », comme le souligne la programmatrice Anne-Claire Guéguin. Mais quels arrêts cinématographiques l’équipe a-t-elle particulièrement apprécié pendant cette balade ? La verrue de Sarah Lasry et Swallow the universe de Luis Nieto. Toutes deux productions françaises, la première est une « belle production française avec une gamine impressionnante » qui a une verrue sur le nez et ne supporte pas son reflet. L’« étrangeté très intéressante » de la deuxième nous mène dans les jungles profondes de Mandchourie. La présence d’un enfant perdu engendre une anarchie dans ce monde parfaitement organisé des animaux de la faune locale.
La séance « Natures et découvertes » n’aura pas comme sujet principal les produits stars de la boutique du même nom. Aux côtés de Mantra de Stef Meyer et d’Harmony de Céline Gaileurd, « deux films français très intéressants », Skin & Bone de l’Américain Eli Powers termine le top 3 de l’équipe. Ce film magnifique, avec Amanda Seyfried en prime, est une traversée dans un monde déroutant où un vagabond, employé par une femme solitaire, commence à avoir des visions d’hommes piégés dans des corps d’animaux…
La compétition internationale se clôturera avec la séance WTF, prix du public, « Égoutte ton corps ». Parmi les films qui ont émoustillé la team métrange : le délirant The Blood of the dinosaurs de Joe Badon et Staging Death de Jan Soldat, « notre hommage à Udo Kier », acteur qui a tenté plus de 70 fois de donner une expression à la mort et au décès.
Quand à Visitors de Kenichi Ugana, il semble faire honneur au cinéma du pays du Soleil-Levant tel qu’on le connaît et qu’on l’aime. Le résumé est somme toute simple, des amis rendent visite à un ami, mais son comportement est étrange… « un délire venant du Japon qui explore tellement de motifs du genre qu’on a succombé ». Sans nul doute que les aficionados du cinéma japonais succomberont également…
Vous l’aurez compris, chaque séance possède ses pépites cinématographique. Ne serait-ce pas une invitation à aller découvrir toutes les projections ?
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