Dans cet essai publié aux éditions Les Chemins de traverse, Philippe Lazar propose de rééquilibrer les pouvoirs entre savoirs et politique, entre institutions et société civile, entre experts et profanes.
Comment imaginer qu’un jour je chroniquerais un livre de Philippe Lazar ? Nous nous sommes en effet croisés quelques fois par le passé dans un contexte totalement différent. Il était alors directeur général de l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale) et moi, simple chercheur. Voilà, vous savez tout du contexte. Enfin presque. Inutile de dire combien j’étais impatient d’avoir son livre en main dès que j’ai appris sa parution. D’autant plus que le mot de laocratie dans son sous-titre ne cessait de m’intriguer !

Un livre en petit format de quelques 80 pages, léger par son poids et traitant pourtant d’un sujet crucial : notre modèle de démocratie est-il à bout de souffle ? Comment lui redonner un futur ? Le premier, et considérable, mérite de Philippe Lazar réside dans cette volonté de s’éloigner de toute lamentation sur l’état de notre modèle, de toute invective politique et de toute prédiction apocalyptique sur un devenir impossible où les formules à l’emporte-pièce de nos responsables fleurissent pour faire les manchettes et le buzz sur les réseaux sociaux. Il s’agit pour lui d’encourager le débat d’idées et de proposer des directions possibles pour répondre à ce défi sans y perdre nos âmes, c’est-à-dire sans renoncer aux principes fondamentaux de notre République et à la vie en commun.
Sur notre démocratie, il frappe fort d’entrée. Nous ne sommes pas dans une démocratie représentative, nous dit-il, mais dans une démocratie délégataire où le pouvoir central est donné à un petit nombre d’élus. Un tel modèle peut-il prétendre représenter la totalité de la population ? C’est-à-dire ce que nous nommons souvent « société civile », dans sa diversité culturelle, sociale, associative, mais aussi dans ses croyances, ses mémoires et ses aspirations. Comment dès lors faire évoluer ce modèle pour que chacun puisse avoir la certitude de se faire entendre et reconnaître ? Le référendum ne convient qu’à des questions très précises et les conventions citoyennes ont, elles aussi, leurs limites, comme nous avons pu le constater tout récemment. Il faut donc trouver autre chose, quitte à modifier la Constitution.
C’est ce chemin que Philippe Lazar nous propose en introduisant un terme, laocratie, d’origine grecque, pour désigner cette part de notre vie, de nos vies, qui ne relève pas des institutions, des lois, des normes, mais du tissu de relations, d’engagements, de solidarités et de rêves qui donne sens et légitimité à notre existence individuelle et collective.
Un petit format, certes, mais qui mérite plus d’une lecture. Et une formidable incitation à réfléchir, à innover et à nous retrouver. En un mot : à être-ensemble.
Philippe Lazar, Démocratie sous tension. Rééquilibrer les pouvoirs par la « laocratie ». Collection « Débords », Éditions Les Chemins de traverse. 80 pages. Prix papier : 5 € – ISBN : 9782313068274 / Prix numérique : 1,49€ – ISBN : 97823130688281 . Parution : 2025
N.B. : le premier volume de la collection « Débords », La démocratie au défi du partage, a été signé par Philippe Kourilsky. Plus d’informations sur : bouquineo.fr.
