C’est à l’automne 2016 que DOA a publié la seconde phase de son opération romanesque Pukhtu. Pukhtu Secundo reprend l’action à l’instant précis où Primo (publié en 2015) s’achevait. Il parachève sur un rythme échevelé ce récit de guerre noir comme le cœur des hommes.

Dans ce nouvel opus, Secundo, puisque Pukhtu est un seul roman coupé en deux, DOA construit une histoire complexe, véritable et planétaire, évoluant sur plusieurs sites et plusieurs continents. L’action débute donc en Afghanistan en 2008, Shere Khan, fier Pachtoune, est victime d’un tir de missile par un drone et perd deux de ses enfants : sa vengeance implacable est l’un des premiers moteurs de l’histoire et celle-ci se base sur le pukhtu à la fois identité et fierté d’être Pachtoune. Face à lui se dresse tout l’appareil militaro-industriel américain avec les centres d’exécution sophistiqués, combinant repérage satellitaire et drone bombardier… Mais également une équipe de « durs à cuire », des vrais passés par la crème de l’élite soldatesque, les SEAL (Sea, Air, Land en français « mer, air et terre » ou Navy SEALs, l’équivalent de nos nageurs de combat. À ceci près que ceux-là sont des contractors c’est-à-dire des « privés ». Car la guerre moderne tend de plus en plus à se privatiser. La logistique annuelle d’un soldat américain est passée de1945 à nos jours de 45 000 à 1 000 000 de dollars d’où une source de profit colossale pour des firmes évidemment américaines. C’est le cas de 6 N, filiale de Longhouse société dont les dirigeants ont de fortes connexions avec la CIA. Ces sociétés assurent l’intégralité de la logistique et de la sécurité et prennent une part de plus en plus active au conflit, ne se contentant plus seulement de former les locaux, mais prenant part aux repérages au sol voire aux combats.

À partir de là, la ligne générale du roman est tracée, évoluant sur divers continents, mêlant amour, désir, trahison, désillusion, violence gratuite et coups fourrés sans limites. Deux tomes ne sont pas de trop, un glossaire compte tenu de la complexité de l’action est fort utile, une playlist musicale ajoute un peu plus d’émotion… Outre la qualité de l’écriture, on insistera sur le sérieux et la densité de la documentation, technique, militaire et géographique que l’auteur dit s’être procuré à 95 % via internet, concédant quand même 5 % de voyages non touristiques, sa qualité d’ancien parachutiste lui ayant sans doute beaucoup servi.
Il y a bien sûr un épilogue à ce roman, mais est-ce vraiment une fin ? Qui sait… La dynamique de l’écriture fait penser un peu à feu Maurice G. Dantec, chantre du cyberpolar, disparu cette année et à William Gibson, autre spécialiste du cyberpunk, un des genres de la SF et qui, comme DOA, adore ces individus, solitaires, un peu déjantés, qui sont les « grains de sable » perturbateurs de l’Histoire.
DOA Pukhtu Primo et Secundo, collection Série noire, éditions Gallimard, 688 pages, 21 €, mars 2015 et octobre 2016
SIGNATURES, DÉBATS, CONFÉRENCES DOA :
AU LIVRE ÉCARLATE le 11 janvier à 19 h, Paris ; AU FURET DU NORD, !e 19 janvier à 17 h, Lille ; À MOLLAT le 24 janvier à 18 h, Bordeaux

Citoyens clandestins
Première parution en 2007
Nouvelle édition en 2015
Collection Folio policier (n° 539), Gallimard
Parution : 08-10-2015
736 pages
8,70 €
GRAND PRIX DE LITTÉRATURE POLICIÈRE 2007
DOA Pukhtu. Primo
Collection Série Noire, Romans noirs, Gallimard
Parution : 26-03-2015
688 pages 21,00 €
- PRIX LIBR À NOUS (POLAR) 2016
- PRIX MYSTÈRE DE LA CRITIQUE 2016
DOA Pukhtu. Secundo
Collection Série Noire, Romans noirs, Gallimard
Parution : 13-10-2016
688 pages 21,00 €
