NOEL GALLAGHER ET SES HIGH FLYING BIRDS EN TERRAIN CONQUIS

Cela fait 9 ans qu’Oasis, l’un des groupes britanniques de rock les plus renommés, a été dissous suite à une énième et violente dispute entre les frères Gallagher. Depuis, le chanteur Liam a lancé son propre groupe Beady Eye avant de sortir, l’année dernière, son propre album solo As you were. De son côté, Noel Gallagher a formé son groupe les High Flying Birds. Le 3e album de cette formation, intitulé Who Built The Moon, est disponible depuis décembre 2017. Dans le cadre de leur tournée, ils ont fait escale le dimanche 26 août au festival du roi Arthur.

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photo Patricia Holss sur Twitter

Cet été, les festivals ont mis en avant dans leur programmation certains groupes et artistes emblématiques de périodes appartenant certes au passé, mais dont les musiques réunissent encore les générations. On pense notamment à la participation de Depeche Mode aux Vieilles Charrues ou encore des membres du groupe IAM lors du festival du roi Arthur le samedi 25 août dernier. C’est lors de ce même festival, le 26 août à 20h15, que Noel Gallagher et son groupe les High Flying Birds ont ravi les nombreux spectateurs présents face à la scène Excalibur.

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Photo : Nico M

Le concert a débuté par l’interprétation de quatre chansons des quatre premières chansons de son dernier album Who Built The Moon. La première d’entre elles, Fort Knox, à l’introduction lente et débutant sur des sonorités synthétiques, est construite autour d’une note faisant presque office de « bourdon » et donnant lieu à une répétition quasi hypnotique. Elle présente également une combinaison de sonorités aériennes de guitares saturées, associées à une rythmique forte. D’entrée de jeu, on remarque donc que l’ancien membre d’Oasis a fait le choix de développer une esthétique musicale réellement atypique, qui mêle de façon habile et pertinente des éléments tirés de plusieurs répertoires. Les plus énergiques, comme Holy Mountain et Keep On Reaching, sont ainsi construites autour de tempos effrénés ainsi que d’accords à la guitare électrique, répétés et parfois martelés, qui semblent tirés du rock garage et du punk. Cela n’a rien de vraiment étonnant, quand on sait que Noel Gallagher a nourri, durant son enfance, une passion sans bornes pour le groupe The Jam, porté alors par son chanteur et guitariste Paul Weller. Keep On Reaching fait également intervenir un jeu de cuivres qui jouent le rôle de ponctuation et qui peut rappeler, en un sens, celui qui prévalait dans les chansons de funk et de soul des années 60 et 70. Noel Gallagher a également réalisé sur cette chanson un appel et réponse avec ses choristes, procédé central dans le gospel et les esthétiques de la soul music.

https://www.youtube.com/watch?v=oTsbNohkxcA

Les morceaux interprétés ce jour-là par les High Flying Birds transcrivent des ambiances contrastant les unes avec les autres et sont fondés sur des rythmes assez diversifiés. Ceux-ci sont effectivement très marqués, voire métronomiques, dans des chansons comme In The Heat of The Moment. Mais dans d’autres morceaux, ils sonnent comme plus effacés et ceci au profit des longues valeurs rythmiques, parfois planantes, des guitares saturées. C’est le cas, par exemple dans The Right Stuff, dont on retiendra également les remarquables envolées lyriques d’Audrey Gbaguidi, l’une des choristes. Ses intonations sonnaient alors comme de véritables incantations qui ont contribué à mettre en place une atmosphère de quasi-transe. Mentionnons également le rôle mélodique important du bassiste Jason Falkner dans cette chanson, de même que dans Holy Mountain.

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photo Patricia Holss sur Twitter

La ligne artistique suivie par Noel Gallagher est ainsi claire. Elle affirme une volonté d’explorer des horizons esthétiques contrastés qui sont presque complémentaires les unes des autres. Mais pour autant, elle ne fait pas table rase d’un passé dont elle est, dans tous les cas, tributaire. Ainsi, les fans de la période Oasis n’ont pas été déçus et se sont vus offrir un florilège de chansons parmi les plus célèbres de l’ancienne formation des frères Gallagher. La première d’entre elles fut Little By Little, suivie de Whatever, titre incontournable dont le souvenir semblait encore vivace chez les spectateurs. Ces nouvelles interprétations de ces morceaux leur ont donné un second souffle : l’enfant de Manchester a rejoué tous ces tubes en les transcendant, le plus souvent en transposant les tonalités et en adoptant une instrumentation différente. Ainsi, après Half The World Away, interprétée dans une version légèrement plus dynamique que la version originale, il a attaqué le tant attendu Wonderwall, de façon très sensible et en y glissant de subtiles et délicieuses variations mélodiques.

https://www.youtube.com/watch?v=8HOmMLTYW7k

Dans ce set concocté par Noel Gallagher et son groupe, les références aux canons les plus efficaces du rock n’étaient jamais bien loin. Y transparaissait principalement l’influence des Beatles, l’une des inspirations les plus importantes dans l’éducation musicale de Noel Gallagher. En effet, les parcours harmoniques de certaines chansons sont proches de ceux exploités par les Fab Four. La chanson Dream On en est un bon exemple et comporte d’autres aspects qui évoquent les morceaux des Fab Four. Cette chanson, en l’occurrence, met notamment en avant un rythme syncopé accentué par le tambourin et des doublures assurées par les choristes qui évoqueraient presque le duo vocal Mc Cartney-Lennon. Le solo de trompette, à la fin de ce même titre, rappelle aussi, dans une certaine mesure, les parties de cuivres présents sur les enregistrements des Beatles à la période des albums Sergent Pepper et Magical Mystery Tour. On remarque, dans le même temps, que l’ancien compositeur d’Oasis partage avec Paul Mc Cartney et John Lennon une réelle inventivité mélodique. Il l’a néanmoins mise à profit de façon différente par rapport ses prédécesseurs et de façon plus manifeste sur le plan rythmique.

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Photo Valentine Jube

On ne peut qu’être heureux de constater que contrairement à son frère Liam, Noel Gallagher ne vit pas dans le souvenir figé de l’époque Oasis, mais prend plutôt un certain plaisir à lui rendre hommage, à sa manière. C’est notamment ce que l’on peut ressentir dans son interprétation plutôt épurée et réellement émouvante de Don’t Look Back in Anger, pendant laquelle il s’est accompagné à la guitare acoustique. Il faut rappeler que cette chanson avait pris un sens tout particulier, lorsqu’elle fut reprise en chœur lors des hommages aux victimes des attentats de Manchester de mai 2017. On peut estimer, sans réserve, que ce fut le véritable climax de ce concert, tant il semble difficile de résister à la puissance émotionnelle intrinsèque de cette chanson. Visiblement, Noël Gallagher et les High Flying Birds avaient un message d’espérance et d’unité qu’ils ont réussi à transmettre aux spectateurs. Ces derniers n’ont pas manqué de leur témoigner leur reconnaissance par de vives acclamations. Les artistes ont finalement conclu leur concert sur une version très fidèle d’All You Need Is Love, hymne qui sonne comme un hommage aux véritables modèles que furent les Beatles dans son parcours. Une prestation magistrale qui devrait rester longtemps dans les mémoires des festivaliers.

https://www.youtube.com/watch?v=297biGK0EIY

La page Facebook de Noël Gallagher, ici.

Sa chaîne Youtube ici.

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Pierre Kergus
Journaliste musical à Unidivers, Pierre Kergus est titulaire d'un master en Arts spécialité musicologie/recherche. Il est aussi un musicien amateur ouvert à de nombreux styles.

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