C’est avec un nouveau succès à son actif que OSB, l’Orchestre Symphonique de Bretagne, a conclu le jeudi 21 février cette soirée consacrée au « spring festival » que nous avons coutume d’appeler « Nouvel An Chinois ».
L’ouverture nous met tout de suite dans l’ambiance. Une musique joyeuse et primesautière plante un décor plus vrai que nature. Il est difficile de faire plus chinois que cette composition de Li Huan Zih, et l’OSB nous étonne en interprétant ces pages avec le brio d’un orchestre pékinois. Riche idée que d’habituer nos très occidentales oreilles à cette esthétique si particulière, avec un air des plus digestes.
Rassurés, nous abordons avec curiosité le « butterfly lovers concerto ». Cette jolie légende transpose sur un mode très poétique et oriental le thème… de l’amour… universel s’il en fut.
Cette musique, pleine de délicatesse et de simplicité, alterne des moments épiques avec des séquences d’une grande retenue. À ce moment précis, une partie de l’âme chinoise nous est pudiquement dévoilée. Ce concerto allie avec adresse des techniques occidentales à des mélodies conçues pour les instruments traditionnels chinois ; et l’OSB se livre à des « glissandos » aussi opportuns qu’inhabituels. Le violoniste, Kong Zhao Hui, rigoureux et un brin « ancien régime », impose une interprétation exigeante, précise, et authentique. Dès cet instant, le public nombreux et plutôt jeune est conquis.
Mais Darrell Ang, jeune directeur musical de l’OSB nous réserve d’autres surprises et non des moindres. Dés son entrée, l’ensemble « Jing ying » qu’il a sélectionné semble avoir partie gagnée : non content de piquer notre curiosité en présentant des instruments totalement inconnus, il nous incite à vouloir d’avance tout leur pardonner tant les membres en sont jeunes, presque des enfants.
Nous en serons pour nos frais : ils nous entraînent dans un festival de sonorités exotiques, servies par une technique impeccable et déclenchent un tel enthousiasme que plusieurs rappels seront nécessaires pour apaiser un public avide d’en connaître un peu plus long sur cette musique traditionnelle chinoise. D’une flûte traversière de bambou ou « dizi », nous passons à un déroutant orgue à bouche « le sheng », plus étrange encore ce curieux instrument à une seule corde animée par un archet, l’« erhu », la palme revenant au « pipa », sorte de luth à 4 cordes joué avec une vertigineuse dextérité par un Wong Xin Rui âgé de… 22 ans.
La Chine ne pouvait trouver de meilleurs ambassadeurs que ces quatre jeunes gens servant la cause culturelle de leur pays avec talent et gentillesse.
La seconde partie du concert nous propose la symphonie n°1 de Robert Schumann. Si elle a en commun avec cette soirée musicale le thème du printemps, elle nous laisse un peu frustrés. Nous aurions préféré prolonger cette découverte des traditions musicales chinoises. Et il n’y avait aucune raison de craindre que le public rennais ne puisse se satisfaire d’un programme entièrement dédié à cette thématique. L’intention était pure, le pardon immédiat… Il est d’autant plus aisé que la main ferme de Darrell Ang conduit l’OSB avec compétence et nous offre là une interprétation satisfaisante.
Quoi qu’il en soit, il reste encore aux récalcitrants et aux dubitatifs la possibilité d’aller applaudir ces jeunes talents ce soir à 20h. Et ils seraient bien inspirés de s’y rendre… Par le biais de la musique, c’est connaître l’autre au travers de sa culture qui reste le message important. Impossible de ne pas l’entendre. Et puis l’opéra de Rennes, ce n’est pas la cité interdite…
Thierry Martin