Avec le film Première Année, le réalisateur Thomas Lilti, médecin de formation, signe son troisième long-métrage sur le monde médical. Vincent Lacoste – déjà au casting d’Hippocrate (2014) – donne la réplique à William Lebghil dans cette nouvelle comédie dramatique. Coup de projecteur sur l’enfer de la première année en médecine ! Au cinéma dès le mercredi 12 septembre 2018.
« Je pense que ceux qui deviendront médecins se rapprochent plus du reptile que de l’être humain » Benjamin SITBON (William Lebghil)
À l’heure où une réforme gouvernementale pourrait supprimer le concours en fin de première année de médecine, Thomas Lilti replonge dans ses vieux démons et embarque par la même occasion le public avec lui dans le film Première année.
Pour rappel, 8 000 étudiants passeront seulement le cap de la première année de médecine alors qu’ils sont 60 000 à se présenter. La France compte actuellement 290 000 médecins, une grande partie de ces médecins arrivés au travail dans les années 70 partiront dans les 5 à 10 ans à venir (nous sommes actuellement en déficit croissance exponentielle, on parle de la France comme d’un « désert médical »). Si l’on maintient le numerus clausus (nombre fermé en latin), on accroît le déficit sur le territoire alors que la population vit de plus en plus longtemps, que les besoins en accompagnement ne font que grandir… Par ailleurs, les jeunes médecins qui arrivent sur le marché observent deux attitudes : ils ne s’installent pas en campagne ; ne souhaitent plus ouvrir de cabinets (trop de charges) et s’en vont vers les centres hospitaliers ; pour pallier la pénurie, la France fait venir des médecins de pays étrangers (l’Est, les pays du Maghreb, le Proche et Moyen-Orient, etc.)
Après Hippocrate (2014) et Médecin de campagne (2016), le film Première année suit le périple d’Antoine et Benjamin, deux jeunes étudiants rencontrés sur les bancs de la faculté de médecine. D’un échange anodin le jour de la rentrée naît une amitié dédiée aux révisions (et aux révisions) plutôt qu’à la fête, et ce jusqu’au jour fatidique : le concours de la Première Année commune aux Études de la Santé – plus communément appelée la PACES – celui qui permet d’accéder à la spécialité de son choix selon son classement. « Après avoir passé la PACES, j’aurais aimé qu’un film parle de ce que j’ai vécu pendant cette année », souligne le réalisateur Thomas Lilti lors de l’avant-première au cinéma Gaumont de Rennes.
D’un côté, Benjamin (William Lebghil), lycéen qui entre à l’Université Paris Descartes (Paris 5) un peu par hasard après l’obtention de son baccalauréat ; de l’autre, Antoine (Vincent Lacoste), étudiant en première année de médecine pour la troisième fois : l’innocence de la découverte contre la lourde expérience du concours.
« Il faut qu’on devienne des machines à répondre aux questions » Benjamin SITBON (William Lebghil)
Considérée littéralement comme une « boucherie pédagogique », la PACES semble un excellent moyen d’éliminer le surplus d’étudiants, toujours plus nombreux. Pour une personne extérieure, la dénomination peut paraître outrée, mais le public dans la salle – majoritairement des étudiants en médecine, pharmacie, dentaire ou encore sage-femme – est venu juger de la crédibilité et du réalisme du film de Thomas Lilti.
L’horreur de la PACES : Légende urbaine ou réalité ?
Les premières minutes du film Première année donnent le ton. Au vu de l’amphithéâtre bondé, le chahut de début d’année, l’équipe pédagogique déjà alarmiste et la montagne de polycopiés remis le premier jour, cette première année ne semble effectivement pas une partie de rigolade… et les deuxièmes années ne sont pas là pour rassurer les brebis égarées : « L’année scolaire commence en août en médecine […] vous êtes 2000 inscrits, seulement 300 seront admis. Tu t’attendais à quoi ? »
D’entrée de jeu, le personnage de Benjamin est plongé au cœur du problème et les inexpérimentés du milieu se reconnaîtront aisément dans l’innocence de cet étudiant un peu flemmard lâché au milieu d’une jungle de compétiteurs affamés dont il n’avait pas mesuré l’ampleur. « Mon personnage découvre cette première année de manière innocente. Comme lui, j’ai préféré apprendre au fur et à mesure ce que signifiait être étudiant en médecine – précise l’acteur William Lebghil, également présent à l’avant-première – lors du tournage, nous nous sommes rendu compte avec Vincent (Lacoste) combien la première année était violente et le concours impressionnant ».
Culpabilité de ne pas travailler, stress permanent, compétition nourrie par les candidats, mais également par les enseignants… Loin du stéréotype des étudiants débridés que l’on a coutume d’apercevoir au cinéma, le réalisateur propose de « montrer ce qu’est la réalité de la jeunesse quand elle se trouve sur les bancs de l’école, plutôt que la vision d’une jeunesse désœuvrée ». C’est un pari réussi ! Plus qu’une histoire de grosse galère, le film Première année est avant tout le récit d’une rencontre et des liens qui se créent à cette période de la vie, des liens qui boostent et poussent jusqu’au bout.
Des spécificités du cinéma français, Thomas Lilti a retenu l’importance du jeu d’acteur et le poids du psychologique, tout en conservant une simplicité de plans et cadrage appréciée. Sans vouloir faire passer un message dans chaque scène, le film Première année aborde des problématiques certes importantes, il n’en reste pas moins un film divertissant et ludique, pour toute la famille. Le réalisateur le dira lui-même : « Essayez de ne pas regarder le film que par le prisme de la médecine ». Un conseil avisé avant la projection !