FÉÉRIQUE TORTUE DE GAUGUIN PAR LE COLLECTIF LUC AMOROS

Avec La tortue de Gauguin du collectif Luc Amoros, Unidivers poursuit son aventure avec le Festival des Tombées de la Nuit édition 2018. Créé en 2016-2017, Luc Amoros poursuit sa réflexion sur la place de l’art dans l’espace public et offre une chorégraphie plastique qui interroge les spectateurs sur la peinture et son rapport à l’art aujourd’hui. Tout ceci dans une ambiance nocturne et urbaine dont les jeux de lumière ajoutent une pointe de féerie ! Compte rendu.

Une légende. Voici le point de départ de La tortue de Gauguin, spectacle de la compagnie Luc Amoros. Lors d’un séjour aux Marquises, le peintre français Paul Gauguin aurait peint sur la carapace d’une jeune tortue vivante, égarée sur la plage.

« Je me plais à penser que grâce à la longévité dont jouit cette espèce, une œuvre du peintre, tout en échappant ainsi à la cupidité des spéculateurs, continue, aujourd’hui encore, de sillonner les grands fonds dans son petit musée ambulant » (Luc Amoros)

Jeu dans l’espace urbain, processus créatif et show collectif, avec cette adaptation d’un épisode de la vie du peintre postimpressionniste, les Tombées de la Nuit ont confirmé les enjeux du festival. Pour l’édition 2018, le parc du Thabor est devenu le théâtre d’un jeu plastique où le travail de l’artiste est mis à nu et l’œuvre montrée à l’état brut, une création en live. Une expérience à la fois sonore et visuelle attendait amateurs et néophytes sur le carré Du Guesclin, accessible par l’entrée St-Melaine.

Collectif Luc Amoros La tortue de Gauguin

23 h. La nuit était déjà tombée sur Rennes, le parc du Thabor plongé dans l’obscurité, mais deux architectures inhabituelles se distinguaient sur le carré Du Guesclin. Parmi elles, l’échafaudage métallique de neuf mètres de haut et cinq de large du Collectif Luc Amoros. La structure dominait l’espace vert et faisait face au public installé dans l’herbe. Des silhouettes noires s’activaient déjà dans les six alvéoles – de minis ateliers d’artistes – réparties sur trois étages alors qu’au rez-de-chaussée, des lumières révélaient une scène où patientaient une oratrice et un musicien.

Collectif Luc Amoros La tortue de Gauguin
© Compagnie Luc Amoros

La Tortue de Gauguin est le dernier volet du triptyque entamé avec Page blanche (2009) puis Quatre soleils (2013). Loin de l’élitisme patent de l’art contemporain et d’une certaine répudiation à toute sensibilité face à l’œuvre d’art, une vision accessible de la création artistique devient enfin possible. Un polyptyque en perpétuel mouvement se dessine au gré des textes écrits par Luc Amoros – portés par la puissance vocale de la récitante – et rythmés par une musique savamment composée. L’oratrice semble souffler l’inspiration aux six plasticiens qui ne cessent de créer dans une scénographie en perpétuelle évolution.

L’art naît dans des dessins d’enfants (brutalement marqués d’un code-barre) et grandit dans les multiples références à l’Histoire de l’Art et à notre société actuelle. À la fois performance, installation et pièce de théâtre, La tortue de Gauguin met en scène une majestueuse histoire des images. Qu’est-ce qu’une image aujourd’hui ? Quelle est sa valeur ? Comment les percevoir dans une société elle-même parasitée par une multitude d’images virtuelles ? Autoportrait réaliste aux couleurs pop, portrait en Fayoum, ombres d’héliotropes… L’histoire s’écrit devant les yeux d’un public impressionné avant de se déconstruire au fil des panneaux-écrans amovibles.

Collectif Luc Amoros La tortue de Gauguin
© Compagnie Luc Amoros

Le spectacle se conclut par une question de prime abord simple, mais qui détient peut-être la clé de La Tortue de Gauguin : « Et toi, pourquoi tu peins ? »

« Je peins pour peindre de nouveaux jours » « Je peins pour ne jamais mourir, je peins pour vivre »
« La nuit, je peins pour allumer des jours »

Renaissance ou purification, une chute d’eau se répand sur l’échafaudage et quelques gouttes de pluie se mettent à tomber. Si le ciel est avec le collectif Luc Amoros, nous ne pouvons qu’abdiquer à cette magistrale représentation !

Site Internet : http://www.lucamoros.com

DISTRIBUTION

Écriture, mise en scène : Luc Amoros
Composition musicale : Alexis Thépot
Artistes en scène : Léa Noygues, Lou Amoros, Brigitte Gonzalez, Itzel Palomo, Thomas Rebischung, Sylvie Eder, Emmanuel Perez, Ignacio Plaza Ponce
Direction technique : Vincent Frossard
Lumière et vidéo : Martin Descourvières
Son : Thomas Kaiser
Administration : Mathieu Desanlis

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