VICTORINE ! S’ÉMANCIPE PAR LA DANSE AU TRIANGLE

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Mardi 19 et mercredi 20 octobre 2021, le chorégraphe Sébastien Laurent, de la compagnie Moi Peau, proposera Victorine !, revisite dansée de l’album Votez Victorine ! de Claire Cantais, au Triangle – Cité de la danse. Un conte chorégraphique moderne et engagé qui éveillera les plus jeunes sur les questions de la représentation de la femme dans les œuvres d’art.

Après une vingtaine d’années en tant qu’interprète pour de multiples compagnies, le chorégraphe Sébastien Laurent fonde la sienne, en 2013. Elle prend alors le nom de Moi Peau, en écho à l’ouvrage éponyme, publié en 1985, par le psychanalyste français Didier Anzieu. Concept développé à partir de 1974, la fonction du Moi-Peau est, selon René Roussillon, de « proposer une première forme de délimitation entre le moi et son environnement ». « L’idée était d’exprimer cette relation intime entre l’intérieur du corps et son environnement extérieur, la sensation de la peau avec le toucher, le contact avec les autres et le sol », explique Sébastien Laurent. Parallèlement à son activité de chorégraphe, il poursuit par ailleurs celle d’interprète, même si elle est aujourd’hui moindre.

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Sébastien Laurent, chorégraphe de la création Victorine ! et interprète, compagnie Moi Peau

Les projets de la compagnie Moi Peau s’appréhendent comme une évolution à sa pratique d’interprète. Ses premières créations croisent par exemple le medium photographique et la danse. « Je pratiquais beaucoup la photo à l’époque. Mes premières expérimentations s’articulaient autour de la relation entre l’image et le corps, l’utilisation du corps, du mouvement, et de la danse dans le processus photographique. » Le chorégraphe accompagnait ses pièces d’ateliers, d’expériences et d’expositions où étaient mis en regard le corps et l’image. Un rapport à l’image qu’il entretient dans chaque création.

Le corps en mouvement : image, danse et musique

Avec ses premières pièces, Avis Contraires (2014), un duo qui questionne les écueils des relations humaines, et Contagion (2015), pièce pour quatre danseurs autour de la contagion émotionnelle, Sébastien Laurent aborde le rapport à l’autre où la chorégraphie est le support principal pour faire parler le corps face au toucher.

Rapidement, le chorégraphe pousse sa recherche plus loin et prolonge ses réflexions en rajoutant à la photographie, la vidéo. Puis, vient la question de la musique avec sa troisième pièce, Soli.des, en 2017. « Mon travail sur la musique vient d’une rencontre avec la pianiste Claudine Simon avec qui j’ai réalisé Soli.des. » Trois protagonistes sont mis en scène, deux danseurs, dont le chorégraphe, et la pianiste, dans une scénographie créée à base d’un plancher instable maintenu par le piano à queue. « J’avais envie de réinterroger le rapport à la danse et à la musique sur une relation plus concrète du lien entre la machine, ici le piano, et l’être humain », déclare-t-il. Et de préciser : « Je voulais que la production de sons et de mouvements vienne à la fois du piano, de la musicienne et des danseurs. Que les trois soient impliqué.e.s dans un rapport égal entre son, mouvement sur la musique et la danse. »

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Victorine !, compagnie Moi Peau © Vincent Curdy

Depuis, sa ligne artistique tourne autour du corps sonore, « lieu d’une exploration charnelle de la voix et de la parole – articuler, creuser, fouiller le corps pour faire danser la voix -. Un corps sonore, sensible et social ». Ses réflexions sur le toucher, et l’image, se poursuivent et celles sur la production de mouvement et de son évoluent avec Désenchanter (ré enchanter) en 2019. Aucune bande musicale et aucun musicien au plateau, seulement cinq danseur.se.s qui produisent des percussions par la voix et leur corps, et donc la musique.

« Suivant la salle, scolaire ou tout public, on a un rapport différent, ce qui rythme différemment le jeu. Je me régale à jour avec le rythme de la pièce en fonction de la réception. »

Victorine ! : pièce engagée pour petits et grands

Avec Victorine !, Sébastien Laurent s’aventure vers de nouveaux horizons en intégrant ses différentes préoccupations artistiques.

Pour la deuxième fois depuis la création de la compagnie, il se lance dans la conception d’une pièce jeune public. « Donner beaucoup d’ateliers et de médiations dans les écoles m’avait donné envie de créer Sourdre (2018, solo qui interroge comment cheminer vers un état de danse et comment proposer un voyage vers l‘émancipation et la liberté, ndlr.) au sein même de l’école », se rappelle-t-il. « Je donnais des ateliers dans des territoires assez reculés, loin des lieux culturels, mais en fin de compte, les enfants n’avaient pas accès aux spectacles de danse, ni à d’autres spectacles d’ailleurs. » Le chorégraphe place les enfants au cœur de la création de ce solo, qu’ils puissent le voir au travail et voir un spectacle de danse fini.

Cette expérience décuple l’intérêt du chorégraphe sur sa place en tant qu’artiste au sein de la société, particulièrement de l’école. « J’ai à cœur de travailler dans le jeune public pour ces raisons là. Être un peu au service de l’école, pas simplement par les ateliers, mais aussi sur un travail de création, qui implique les enfants. »

Après Sourdre (2018), Sébastien Laurent s’attaque donc à une revisite dansée de l’album Votez Victorine ! de l’illustratrice Claire Cantais. Cette commande du musée d’Orsay s’empare des questions de la représentation de la femme dans les œuvres d’art, d’indépendance, d’éducation, de l’habit, etc. « Je me penchais déjà sur les questions très actuelles de féminisme, notamment avec Désenchanter (2019). J’avais envie de continuer d’interroger ce thème-là, mais en m’adressant cette fois à des enfants. » Au travers de Victorine !, il cherche à mettre en application la phrase « Il faut mettre la société au servir de l’école et pas l’école au service de la société » du philosophe français Gaston Bachelard, en restant léger et ludique. « C’est important d’évoquer ces problématiques avec les plus jeunes. »

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Victorine !, compagnie Moi Peau © Vincent Curdy

Plutôt que d’utiliser les illustrations issues du livre, Claire Cantais a créé de nouveaux tableaux pour qu’ils puissent s’adapter au mieux au contenu de la pièce. « J’ai tout de suite eu envie que son travail soit impliqué, mis en valeur par l’image dans la pièce. » Ses tableaux, papiers découpés qui créent des univers singuliers, sont d’ailleurs parfois exposés en accompagnement de la tournée ou dans d’autres lieux.

Par peur de la redondance de raconter une histoire par la danse, les images et en même temps la musique, Stéphane Laurent a préféré ne pas réaliser de création musicale spécifique. Cependant, le rapport à la musique est tout de même présent puisqu’il se fait par la découverte de la musique savante et classique. L’œuvre littéraire de Claire Cantais s’imbrique dans l’œuvre musicale de Domenico Scarlatti, plus précisément les 52 sonates de Scarlatti interprétées au piano par le musicien Lucas Debargue. « J’ai choisi une œuvre qui allait structurer le rythme de la pièce. J’aime le côté intemporel de la musique de Scarlatti, les répétitions présentes dans ses sonates me parlent énormément. La structure de cette œuvre est assez forte pour stimuler l’imagination afin qu’un univers puisse émerger et se combiner avec ce qu’il se passe sur scène en fonction des besoins de la danse. » Deux œuvres sont ainsi traversées et peuvent être appréhendées par le jeune public.

Au rapport à la musique et à l’image, avec la présence de projection vidéos, s’ajoute son intérêt pour l’objet en lui-même. « C’était important pour moi que l’enfant soit confronté à l’objet livre. Je voulais que le livre soit présent et qu’on ne soit pas dans un jeu complètement théâtral, mais plutôt une lecture dansée. »

L’univers graphique du livre est omniprésent dans la pièce aussi bien par le livre lui-même, qui permet une interaction entre le public et les interprètes, que par la scénographie : la surface de projection ressemble à un grand livre, la table présente au début se transforme une sorte de livre, etc. « C’est comme si la scénographie était un univers en deux dimensions et que les interprètes créent une troisième dimension, comme un pop up géant où ils seraient pris à l’intérieur du lieu, de l’histoire. L’idée était de rentrer et sortir du livre. »

L’accumulation de références créent plusieurs niveaux de lecture et plonge le public, petits et grands, dans un conte traditionnel avec un côté abstrait, narratif, théâtral et cinématographique. « Ces différentes entrées permettent des points d’accroche pour les enfants qui voient quand même de la danse. La danse contemporaine reste malheureusement confidentielle et peu de spectacles de danse contemporaine s’adresse au jeune public », conclut-il.

Victorine !, Compagnie Moi Peau, Triangle – cité de la danse.

Mardi 19 octobre : 10 h 30 et 14 h 30

Mercredi 20 octobre : 10 h 30 et 19 h

TARIFS

9€ tarif unique
4€ SORTIR !
2€ SORTIR ! enfant

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