BAHAMONTES, UNE REVUE VÉLO QUI DEVRAIT GRIMPER

Le Tour de France vient de s’achever : était-il possible de publier une revue qui ne parle pas de Froome ou de Bardet ? Une nouvelle venue en France, la revue Bahamontes, veut apporter une réponse positive à cette question. Et le démontre avec un talent remarquable grâce à une ligne éditoriale culturelle.

BAHAMONTES

 

Cela ressemble fort à une réaction épidermique. Comme si le flux perpétuel d’informations en temps réel nécessitait de prendre parfois de prendre du recul, de se poser. Ainsi, les « mooks » (contraction du M de magazine et de Book), ces revues, qui se multiplient dans tous les domaines, avec souvent un succès mérité. Une forme proche du livre, une parution souvent trimestrielle sont les supports d’un regard distancié par rapport au quotidien. À son tour le vélo s’inscrit dans cet heureux phénomène de mode avec le premier numéro de la revue Bahamontes du nom du plus grand grimpeur espagnol de l’histoire. Même écrit en petit, une pastille sur la couverture dit tout : « 100 % culture vélo ».

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Sprinteurs : numéro 1 de la revue de cyclisme Bahamontes (France)

Des revues comme Pédale de So Foot, En boucle ou Cyclist (1) se démarquaient déjà des magazines d’actualité du vélo professionnel et amateur. Bahamontes va encore plus loin : « Nous faisons fi de l’écume du jour, mais offrons une place majeure aux sujets intemporels qui resteront gravés dans nos mémoires » est il écrit dans l’édito collectif. Le contenu est bien conforme à cette promesse. Pas de papier glacé ni pratiquement de publicité. La sobriété est de mise avec des photos remarquables de qualité et d’originalité comme ces doubles pages composées de bouquets de vainqueurs ou de bidons d’eau, à la manière d’Andy Warhol. Même si la couverture dédiée aux sprinteurs immortalise des coureurs en activité, les photos figent un geste, une attitude, l’esthétisme d’un mouvement et pas l’arrivée d’une course. L’impression sur un riche papier mat apporte de la douceur et rythme la lente lecture. Cette iconographie et cette mise en page d’une qualité vraiment exceptionnelle dans les moindres détails, y compris la couleur parfois de la typographie, on en retrouve la distanciation dans les articles.

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Bahamontes privilégie l’individu et les histoires de femmes et d’hommes. Une rencontre avec Darrigade, en dehors des anecdotes anciennes, se singularise par l’approche affective de l’ancien sprinteur et de son épouse. André Greipel, le sprinteur de l’ex Allemagne de l’Est, est ausculté non pas à travers son palmarès, mais les paroles de son premier entraîneur et de ses parents heureux que leur fils ait conservé des valeurs familiales dans son métier. Le style des journalistes est au diapason, sachant écrire les mots justes pour évoquer le long coma de Stig Broeckx, accidenté en course ou pour raconter à la manière d’une nouvelle de Marcel Aymé une ligne d’arrivée à Hekelgem avec Jan chargé de la photo-finish et Godelieve, veuve de 94 ans du créateur de la course. Les mots accompagnent les faits avec pudeur, retenue et une qualité d’écriture incontestable.

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La course ou la pratique cycliste ne sont plus que des prétextes pour évoquer des vies, si proches de celle de tout le monde comme celle de Ginette ou de Maja, deux prénoms qui disent tout déjà de deux générations d’hôtesses chargées, entre autres, d’embrasser le vainqueur. Bahamontes offre en effet un espace de liberté de lecture et d’écriture rare dans le domaine de la presse spécialisée.

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On aimerait simplement que les prochains numéros (le numéro 2 sortira début octobre avec pour thème « les porteurs d’eau ») élargissent plus souvent leur champ géographique au-delà de la Belgique, car Bahamontes est le premier opus français d’une revue flamande qui vient de fêter ses 4 ans et son numéro 18.

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On peut espérer que la qualité exceptionnelle de ce livre qui trouvera sa place dans la bibliothèque au côté des ouvrages cyclistes de Paul Fournel ou Louis Nucera, saura gravir les difficultés d’ascension des côtes de notoriété et de rentabilité, dans « une échappée belle », sous-titre justifié de ce superbe ouvrage.

Bahamontes est une revue trimestrielle consacré au cyclisme. Le numéro 1 Sprinteurs est paru le 21/06/2017. 146 pages. 12,50€. L’édition flamande a reçu en 2015 le troisième prix de l’European Design Awards. 14000 exemplaires sont vendus en Belgique pour 4000 abonnés.

revue cyclist

(1) La revue bimestrielle Cyclist qui vient de sortir son numéro 7 est bâtie un peu sur le même principe avec une ligne éditoriale qui privilégie notamment la pratique et le paysage en ne négligeant pas toutefois l’actualité. Moins culturelle, mais néanmoins de qualité, elle s’appuie sur une édition britannique qui a plus de 5 ans et qui est diffusée dans 26 pays différents. Modèle éditorial original et modèle international, pour réduire notamment les coûts, des exemples à suivre avec attention dans le domaine de la presse.

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Federico Bahamontes dans l’ascension du Col du Galibier. 28 juillet 1954. (AP Photo/Str)

Federico Bahamontes est né le 9 juillet 1928 dans la province de Tolède en Espagne. Surnommé « l’Aigle de Tolède », il est considéré comme l’un des meilleurs grimpeurs de l’histoire du cyclisme. Professionnel de 1954 à 1965, il a notamment remporté le Tour de France 1959 et le Grand Prix de la montagne de cette épreuve à six reprises, ce qui en fait le deuxième coureur en nombre de victoires sur ce classement après Richard Virenque. Federico Bahamontes est également monté à deux autres reprises sur le podium du Tour de France (2e en 1963 et 3e en 1964) et une fois sur le podium du Tour d’Espagne (2e en 1957). Il compte onze victoires d’étapes sur les grands tours dont sept sur le Tour de France, trois sur le Tour d’Espagne et une sur le Tour d’Italie, ainsi qu’un titre de champion d’Espagne en 1958. Après sa retraite sportive, Federico Bahamontes reprend la direction de son magasin de cycles et de vélomoteurs à Tolède en 1966 et devient organisateur d’une course cycliste, le Tour de Tolède.

https://www.youtube.com/watch?v=dAG4QxP37wM

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Le duel Anquetil Poulidor sur les pentes du Puy-de-Dôme en 1964, les photos de Gilles Caron dans le Quartier latin en Mai 68, la peur des images des Sept boules de cristal de Hergé, les Nus bleus de Matisse sur un timbre poste, Voyage au bout de la Nuit de Céline ont façonné mon enfance et mon amour du vélo, de la peinture, de la littérature, de la BD et de la photographie. Toutes ces passions furent réunies, pendant douze années, dans le cadre d’un poste de rédacteur puis rédacteur en chef de la revue de la Fédération française de Cyclotourisme.

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