Comment décrire la vie de Rembrandt, peintre génial du dix-septième siècle, sans tomber dans l’hagiographie ? En dessinant la vie d’un homme tout simplement. Typex, dessinateur néerlandais, part ce parti pris du quotidien, réussit ainsi à nous faire entrer dans la vie intime de Harmenszoon Van Rijn, autrement dit à partager le quotidien de Rembrandt.
Une centaine de toiles. Une centaine de fois, Rembrandt, 
« Qui suis-je ? » s’interroge-t-il en regardant son reflet. « Qui est-il ? » nous propose-t-il sur ces toiles qui comptent parmi les plus importantes de l’histoire de l’art.
Ces questions, Typex, pseudo derrière lequel se cache Raymond Koot, comme de nombreux dessinateurs néerlandais attachés à l’histoire de la peinture néerlandaise (voir article Unidivers « Vincent » de Barbara Stok), a tenté d’y répondre dans un magnifique roman graphique de plus de 250 pages. Le début de l’ouvrage peut surprendre : un bateau décharge à quai des animaux exotiques, dont un éléphant récalcitrant. Le dessin est noir et sourd. Rembrandt n’apparaît que subrepticement, spectateur parmi d’autres, croquant l’animal sur son carnet comme le ferait aujourd’hui un photoreporter. C’est ainsi que s’ouvre la première des onze séquences dessinées, non chronologiques, a priori sans rapport les unes aux autres, qui au final vont dresser un portrait remarquable et tout en subtilités d’un être attachant, arrogant, précieux et frustre, aimant et égoïste, d’un être tout en contradictions. D’un homme tout simplement au milieu de ses semblables.

Contrastés, ses dessins le sont : tantôt hyper réalistes 
Alternent ainsi les procédés graphiques différents : le noir et blanc précède la couleur, les traits précis côtoient l’esquisse. Certaines pages se rapprochent du conte pour enfants alors que d’autres ressemblent à des gravures de mode du début du siècle dernier.

Inventif dans son dessin comme dans sa narration, le dessinateur sait, jusqu’aux sept dernières pages, poignantes et magistrales, évoquer, suggérer nous offrant un portrait en nuances. Un portrait fidèle à son modèle. Un portrait en clair-obscur. Un portrait qui nous livre un peu de la vérité de ce regard peint tant de fois. Plus d’une centaine de fois.
Rembrandt de Typex. Éditions Casterman; traduit du néerlandais par Daniel Cunin. 264 pages. 25 €.
Une autre BD parue en 2009, mais toujours disponible, porte le même titre. Elle a été réalisée par Olivier et Denis Deprez, là aussi chez Casterman (62 planches, 15 €). Beaucoup moins ambitieuse, elle vaut surtout pour l’évocation de la ville d’Amsterdam et des paysages environnants magnifiquement dessinés. Pour le lecteur qui souhaite aller plus loin dans la vie et la peinture de Rembrandt, un seul ouvrage de référence, indispensable et passionnant : Les yeux de Rembrandt de Simon Schama au Seuil. Publié en 2004, il est toujours disponible (840 pages. 69 €) et croise intelligemment la vie du peintre néerlandais avec celle de Rubens en parcourant un demi-siècle d’histoire de l’art.
