Rennes Glaz Festival. Counter Power, les grandes organisations exposées par Lewis Bush

Lewis Bush Counter Power Rennes 2
Depravity's Rainbow © Anne-Laure Deylaud

Lewis Bush expose à la Galerie Art & Essai de Rennes 2 jusqu’au 22 décembre 2023. Dans le cadre de Glaz festival, le photographe présente trois séries : Metropole (2014-2018), Shadows of the State (2015-2018) et Depravity’s rainbow (2018-2022). 

Lewis Bush Counter Power Rennes 2 Galerie Art et Essai
Lewis Bush devant son exposition Counter Power

La Galerie Art & Essai de l’université Rennes 2 accueille jusqu’au 22 décembre 2023 les photos et documents de Lewis Bush, photographe et écrivain qui s’intéresse aux grandes organisations. Il fait des recherches sur la manière dont ces dernières affectent nos vies alors quelles sont difficiles à comprendre et parfois même difficiles à percevoir. Introduit à Bruno Elisabeth, vice président en charge de la culture et de la documentation à Rennes 2, maître de conférence au département artistique et directeur artistique de la Galerie Art & Essai, Lewis Bush présente son travail dans le cadre de Glaz festival. Entretien.

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  • Counter Power Rennes 2 Lewis Bush Galerie art et essai

Unidivers- Pouvez-vous me décrire en quelques mots vos trois séries de photo ?

Lewis Bush – Metropole s’intéresse à Londres et plus précisément à la façon dont la ville a changé dans les dix ou vingts dernières années. La série montre et dénonce le développement de propriétés pour les grands investisseurs. La construction n’a pas été faite pour les Londoniens, mais pour des personnes au-dessus avec des intérêts financiers. Le résultat, c’est qu’il y a ces énormes parties de la ville qui sont comme des quartiers fantômes où personne ne vit. Je me questionne sur cette transformation de la ville par l’argent et dans l’intérêt unique de l’argent, qui provoque une mise à l’écart des habitants de Londres.

Shadows of the state se penche sur une forme très spécifique de l’espionnage : les radiodiffusions. C’est ce même système qui est utilisé pour envoyer des messages entre une agence d’intelligence comme la CIA et leurs agents sous couverture dans d’autres pays. Ce qui m’intéresse à propos de ces stations de radio, c’est que n’importe qui peut les écouter et y avoir accès. L’idée est d’essayer de tracer d’où les messages viennent afin de savoir ce qu’ils sont et de qui ils sont. Mon travail consiste à localiser les transmissions partout dans le monde, grâce à des systèmes de cartes satellites principalement, y compris un en France qui est dans le projet. 

Depravity’s rainbow est une exploration de l’espace du regard de la première fusée qui a été développée pendant la Seconde Guerre mondiale comme une arme par l’armée allemande nazie. Cette dernière servait à attaquer des villes comme Londres et Paris. Mon regard s’est porté sur l’homme qui a développé cette fusée, Wernher von Braun. À la fin de la Seconde Guerre mondiale, l’Amérique lui a donné un autre travail et une autre vie. Il est devenu l’une des personnes les plus importantes à la NASA en contribuant à la construction de la fusée qui a engendrée les premiers pas sur la lune. J’interroge le fait que son passé ai été couvert pendant très longtemps parce que les États-Unis voulaient son savoir. Ils étaient prêt à ignorer le fait qu’il avait été dans l’armée germanique, un SS présent dans les camps de concentration, qu’il était une mauvaise personne en fait.

Unidivers – Quel est le lien entre votre exposition et la thématique de l’urgence de Glaz festival

Lewis Bush – Je pense que le lien vient du fait que beaucoup des choses qui se passent dans le monde en ce moment se ressentent comme des urgences. Elles se connectent à mes yeux à ses organisations et ses personnes sur lesquelles je travaille. Par exemple, le changement climatique est évidemment une urgence massive et l’un de mes projets dans l’exposition est à propos de l’exploration de l’espace. Une exploration de l’espace qui est souvent décrite comme une solution pour changer les choses, qu’on puisse juste quitter la planète, aller dans l’espace et y vivre. Mais cette exploration est en réalité une importante cause du changement climatique alors je questionne la manière dont ses organisations puissantes disent une chose, possèdent une image public alors que la réalité peut être un peu différente. L’idée aussi derrière cette exposition c’est de faire de ces urgences quelque chose qui nous appartient plus d’une manière ou d’une autre. 

Unidivers – Qu’est ce qui unit les trois séries sur cette exposition ? 

Lewis Bush – Elles sont toutes connectées de différentes manières. Les développeurs de propriétés dans Metropole utilisent des techniques similaires de celles des espions, ce qui est étrange. Le fait est qu’ils ont beaucoup de techniques et de matériels qui servent à garder leurs activités secrètes. L’idée de se cacher est très présente et c’est aussi dans la série Depravity’s Rainbow, le fait de garder secrète l’histoire de Wernher von Braun. D’ailleurs, les bombes qu’il a construite pendant la Seconde Guerre mondiale avaient laissées des terres vides à Londres, elles ont servi pour construire des maisons sociales. Ce sont ces personnes qui étaient dans le besoin qui ont été mis à l’écart au profit du développement dont je parle dans Metropole. Il y a cette connexion circulaire d’un projet à l’autre.

Lewis Bush Counter Power Metropole Rennes 2 Galerie Art et essai
Image tirée de la série Metropole © Lewis Bush

Unidivers – Pourquoi ces trois thématiques pour illustrer le pouvoir ? 

Lewis Bush – Je pense que la raison pour laquelle j’ai choisis ces trois thèmes c’est parce que ce sont tous des sujets très spécifiques mais en même temps, à travers eux, on peut parler de beaucoup d’autres choses. Par exemple dans Depravity’s Rainbow, tu peux parler de technologie, de l’holocauste, du futur dans l’espace, un sujet sur un seul homme, très spécifique, mène a beaucoup de réflexions. 

Dans les livres sur les projets qui seront à disposition durant l’exposition, c’est plus facilement montré. Mais je pense que j’ai choisi chacun de ces sujets comme une opportunité de parler de plus de choses. C’est dur de l’expliquer, mais tous mes projets sont reliés dans une carte que j’ai faite, tout est planifié. Je vais faire seize projets et ensuite je m’arrêterai. C’est pour ça que c’est important pour moi d’avoir un projet qui se connecte avec un tas de choses différentes.

Unidivers – Le descriptif de votre exposition par la galerie évoque une absence de forme tangible. Qu’est-ce que ça veut dire selon vous ? 

Lewis Bush – Il y a énormément de choses qu’un photographe ne peut pas montrer de manière tangible et je pense que j’ai trouvé un défi intéressant en tant que tel : je n’essaye pas de les montrer, car c’est impossible, mais de les suggérer. Avec la photo d’une part, mais pas uniquement, je montre aussi des documents et d’autres matériels que j’utilise dans l’exposition. Tout est de l’ordre de l’interprétation, je cherche des manières de suggérer des choses et de pousser les gens à imaginer ce qu’il y a derrière les photos concrètement. Dans Shadows of the State (la série sur l’espionnage), je ne peux pas pas montrer ce monde à travers des photos, c’est trop secret. J’essaye plutôt de faire comprendre l’aspect du secret. 

Counter Power Lewis Bush Rennes 2
Image tirée de la série Shadows of the State © Lewis Bush

Unidivers – Quels sont vos techniques pour créer vos images ? 

Lewis Bush – Pour Metropole, j’utilise la double exposition, quand tu prends successivement des photos et que tu les mets les unes par dessus les autres. J’ai choisis cette technique, car je voulais correspondre à l’idée de complexité des activités de la cité londonienne. Je voulais aussi créer un sentiment d’écrasement, car c’est ce que je ressens maintenant à Londres, je suis submergé par ces immeubles immenses. 

Pour Shadows of the State, j’utilise des images satellites d’une part parce que ça me permet de regarder ce sur quoi je travaille d’une manière idéale. C’est aussi parce que c’est une technologie inventée pour espionner donc il y a cette connexion.

Enfin, pour Deparvity’s Rainbow, j’utilise un très vieux processus photographique : le cyanotype (blueprint en anglais). Il est utilisé par les ingénieurs, en astronomie et en architecture beaucoup, ça se connecte donc avec les sciences, la technologie et l’espace. De plus, il y a aussi un lien avec l’holocauste, car la chimie du cyanotype est très similaire à la chimie utilisée dans les chambres à gaz. Certaines d’entre-elles ont encore sur leur mur la couleur bleue qui s’en dégageait. 

Lewis Bush Counter Power Rennes 2
Image tirée de la série Depravity’s Rainbow © Lewis Bush

Unidivers – Pouvez-vous me parler de votre scénographie ?

Lewis Bush – Il y a beaucoup de choses qui changent selon l’endroit où j’expose. L’idée ? c’est de dédier tout l’espace au projet, qu’on puisse voir très rapidement dans quel projet on est : par rapport à la couleur des murs, les images. Ensuite, je voulais aussi inclure beaucoup d’éléments dans l’exposition, pas seulement des photographies mais aussi des documents, mes recherches… 

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Unidivers – Je vous remercie Lewis Bush.

Article à lire également :

INFOS PRATIQUES

La galerie Art & Essai
Université Rennes 2 – Campus Villejean, Place du Recteur Henri Le Moal 35000 Rennes

Exposition Counter Power jusqu’au 21 décembre 2023

Livres d’art sur les trois séries : Metropole, Shadows of the State (en anglais), Deparavity’s Rainbow (en anglais)

Horaires de la galerie : du lundi au vendredi de 13h à 18h

Lewis Bush sur Instagram

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