Rennes. Trafic démantelé à Maurepas : 116 gendarmes pour mettre fin à un règne

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Par une matinée d’apparence banale, c’est tout un quartier qui a tremblé. Le 17 juin 2025, Maurepas s’est réveillé au son des sirènes et des bottes lourdes. 116 gendarmes déployés. Quinze interpellations. Neuf armes à feu. Deux kilos de cocaïne. Cinquante kilos de résine. Un réseau structuré, tombé d’un seul coup. Mais derrière les chiffres, une histoire. Celle d’un trafic enraciné, d’un quartier sous pression, et d’une mécanique rodée mise à mal après un an d’enquête discrète et méthodique.

6h du matin, Maurepas encerclé

Les habitants de Maurepas, quartier prioritaire du nord de Rennes, ont vu débouler ce matin-là des dizaines de véhicules banalisés. Ce n’était pas une descente ordinaire : c’était une opération coup-de-poing, le genre de celles qu’on baptise « Place nette XXL ». La cible ? Un réseau de trafiquants bien installé, actif depuis au moins deux ans.

Depuis des mois, les gendarmes de la brigade de recherches de Rennes observaient, écoutaient, retraçaient les allers-retours, les échanges, les ventes. Des heures de filatures, des écoutes, des repérages, des identifications. Jusqu’à cette décision : frapper fort, une bonne fois pour toutes.

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Un trafic hyperactif, une logistique huilée

Chaque jour, sur un point de deal identifié du quartier, entre 50 et 80 transactions étaient recensées. Cannabis, cocaïne, parfois héroïne. Une boutique ouverte quasi 24h/24, avec des guetteurs, des nourrices, des livreurs. Le tout avec une organisation quasi-entrepreneuriale. Les produits arrivaient par convois depuis la région parisienne ou les Pays de la Loire, stockés dans plusieurs caches disséminées en Ille-et-Vilaine… mais aussi en Vendée, à 150 kilomètres de Rennes.

Le butin de l’opération

Les perquisitions, menées en simultané sur plus de dix sites, ont été spectaculaires. Le bilan :

  • 50 kg de résine de cannabis,
  • 7 kg d’herbe,
  • 2 kg de cocaïne,
  • 34 000 € en liquide,
  • 9 armes à feu,
  • 11 véhicules (dont plusieurs de location ou aux plaques trafiquées),
  • ainsi que 350 paquets de cigarettes et 131 paquets de tabac à rouler, signes d’un trafic annexe en parallèle.

Les saisies confirment un trafic de grande ampleur, structuré sur plusieurs échelons et bien financé.

15 interpellés, 8 écroués

Au total, quinze personnes ont été interpellées, à Rennes, dans sa périphérie, et même en Vendée. Onze ont été placées en garde à vue. Au terme des auditions, huit ont été mises en examen puis placées en détention provisoire, considérées comme des figures centrales du réseau : chefs présumés, logisticiens, ravitailleurs. Deux sont sous contrôle judiciaire, une a été relâchée.

Un quartier sous tension

Maurepas n’en est pas à son premier coup de filet. Depuis plusieurs années, le quartier vit au rythme de la reconquête policière. Des actions régulières y sont menées dans le cadre des plans de lutte contre le trafic de drogue, mais la tâche reste ardue. Les trafiquants s’adaptent vite. Ils changent de point de vente, passent par les réseaux sociaux, utilisent les mineurs comme mules ou guetteurs.

Mais cette opération marque un tournant. Rarement une action de cette ampleur avait été déployée dans le bassin rennais. « Ce réseau faisait partie des têtes de pont régionales », indique une source judiciaire. « L’objectif, ce n’est pas seulement d’arrêter des petites mains, mais de casser les réseaux à la racine. »

Des opérations « Place nette » devenues systémiques

Cette descente s’inscrit dans la série d’opérations dites « Place nette », dispositif national voulu par le ministère de l’Intérieur depuis fin 2023 pour reconquérir les territoires sous emprise narco. À Rennes comme ailleurs, l’idée est de frapper fort, de montrer que les forces de l’ordre ne lâchent pas, et que l’impunité recule.

Et maintenant ?

Reste à savoir ce que ce coup d’arrêt changera durablement. Les trafiquants ont l’habitude de se reconstituer vite, de muter, de se fondre à nouveau dans le décor. Mais la justice compte bien aller jusqu’au bout. Les mis en examen risquent de lourdes peines pour association de malfaiteurstrafic de stupéfiantsdétention d’armes, et blanchiment.

En attendant, Maurepas souffle. Un peu. L’espace d’un été, peut-être, le quartier aura droit à un répit. Avant, peut-être, un retour de flamme.

À suivre : l’instruction judiciaire est en cours. L’audience pourrait avoir lieu d’ici fin 2025 au tribunal judiciaire de Rennes. Un procès très attendu, qui dira si la peur peut changer de camp.